Les dirigeants de la planète ont adopté vendredi un ambitieux programme promettant un monde meilleur d'ici 15 ans dans tous les domaines, éducation, pauvreté, santé, environnement, au coût incalculable et sans garantie de succès.

À l'ouverture d'un sommet qui réunira jusqu'à dimanche plus de 150 chefs d'État et de gouvernement au siège de l'ONU, ils se sont fixé 17 objectifs de développement durable à réaliser d'ici fin 2030.

« Nous devons nous mettre au travail, tout de suite », a affirmé le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. Pour commencer, il a « demandé à tous les gouvernements d'adopter à Paris en décembre un accord sur le climat solide et universel ».

La jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, championne du droit à l'éducation pour les femmes, a exhorté les gouvernements à « tenir leurs promesses d'une éducation pour tous ».

La chancelière allemande Angela Merkel a préconisé de « traiter les causes » de l'exode des réfugiés qui « fuient la terreur et la violence », soulignant que la paix était « une condition préalable » au développement.

Le premier ministre indien, Narendra Modi, a salué lui « la prééminence du changement climatique » dans les objectifs et a « espéré que les pays développés tiendront leurs engagements ».

Pour son premier discours à l'ONU, le président nigérian Muhammadu Buhari a promis de mieux lutter contre la corruption et autres « pratiques criminelles ».

Le président du Zimbabwe Robert Mugabe a réclamé une nouvelle fois « la levée inconditionnelle des sanctions » contre son pays, expliquant qu'il lui serait ainsi plus facile d'appliquer les objectifs de l'ONU.

Pour le pape François, monté juste avant à la tribune de l'Assemblée générale de l'ONU, le nouveau plan d'action est « un signe important d'espérance ». Mais il ne suffit pas, a-t-il averti, de « rédiger de longues listes de bonnes intentions ».

L'objectif numéro un est « d'éliminer la pauvreté sous toutes ses formes » : 836 millions de personnes vivent encore avec moins de 1,25 dollar par jour.

Trop ambitieux?

Il faudra aussi assurer l'accès de tous à l'éducation et à la santé, lutter contre les inégalités croissantes, promouvoir les femmes et la bonne gouvernance, et limiter le réchauffement de la planète.

Ce chantier pharaonique fait suite aux Objectifs du millénaire pour le développement (MDG), qui portaient sur la période 2000-2015.

Mais il est beaucoup plus ambitieux, trop disent les sceptiques, que les huit MDG.

Le nouveau plan d'action s'appliquera aussi aux pays développés et s'étendra à des domaines politiquement sensibles : bonne gouvernance, égalité hommes-femmes, lutte contre la corruption.

Il faudra le financer, s'assurer que les gouvernements le respectent et que « personne ne soit laissé de côté » dans la course au développement.

S'ajouteront à ces défis la forte croissance démographique attendue d'ici 2030 en Afrique subsaharienne, l'urbanisation à outrance ou le vieillissement de la population, qui alourdit les comptes sociaux.

Et comme le rappelait l'ambassadrice américaine à l'ONU, Samantha Power, « une guerre civile dans un pays en développement peut ramener l'économie de ce pays 30 ans en arrière ».

Chaque pays restera libre d'appliquer ou non les objectifs et choisira les moyens de le faire.

Il faudra, selon les experts, trouver entre 3500 et 5000 milliards de dollars par an sur 15 ans, voire davantage, pour le financer. C'est plus que le PIB de la France, du Royaume-Uni ou de l'Allemagne.

Or, l'aide au développement accordée par les États riches aux plus pauvres est en baisse pour cause de crise économique.

L'ONU table donc sur une meilleure collecte de l'impôt dans chaque pays et sur la lutte contre la corruption. Elle compte surtout beaucoup sur les investisseurs privés. Il n'est pas sûr que ceux-ci verront dans chaque objectif une promesse de gain et qu'ils préféreront toujours le bien commun au profit immédiat.

Les résultats du précédent plan sont mitigés. Extrême pauvreté et mortalité infantile ont chuté de moitié par rapport à 1990, des maladies comme le paludisme sont en net recul et 92 % de la population des pays en développement a désormais accès à la téléphonie mobile (contre 10 % en 2000).

Mais l'environnement a souffert de la croissance accélérée en Chine ou en Inde et les inégalités se sont creusées, l'Afrique subsaharienne et l'Asie du sud restant à la traîne.

Une personne sur quatre est mal nourrie en Afrique subsaharienne, alors qu'on gaspille 1,3 milliard de tonnes de nourriture chaque année dans le monde, et 57 millions d'enfants ne sont pas scolarisés.

Deux milliards et demi de Terriens n'ont pas accès à des toilettes et 1,3 milliard ne dispose pas encore d'un réseau électrique moderne.