Incapable de satisfaire ses appétits en matières premières, la Chine compte sur deux énormes projets miniers dans le Grand Nord canadien pour combler son besoin de zinc, mais les défenseurs de l'environnement soulignent les dangers pour la population de caribous.

Le sous-sol des environs des lacs Izok et High, dans le territoire du Nunavut, dans l'Arctique, sont censés regorger d'énormes quantités de ce minerai, et les sociétés se pressent pour construire les infrastructures de transport et de forage.

MMG, une filière australienne de la société publique China Minmetals Corporation souhaite bâtir un complexe minier de deux milliards de dollars.

Mais tout développement est soumis au feu vert d'Ottawa, qui a durci les règles sur l'investissement étranger depuis l'acquisition record il y a un mois, pour 15,1 milliards de dollars, du dixième groupe pétrolier canadien par le géant public chinois CNOOC.

Le projet de MMG prévoit d'ériger des digues et de drainer partiellement plusieurs lacs afin d'accéder aux gisements de zinc, mais aussi de construire une piste d'atterrissage. À cela s'ajouteraient des centaines de kilomètres de route et plus de 60 ponts.

Un port en eau profonde, sur le littoral de l'Océan arctique, est également en projet: grâce à la fonte des glaces qui s'accélère avec le réchauffement climatique, le passage du Nord-Ouest est en effet considéré comme un itinéraire idéal pour permettre aux navires de rejoindre rapidement l'Asie depuis le Grand Nord.

Les investisseurs chinois espèrent ainsi extraire chaque année, 180 000 tonnes de zinc et 50 000 tonnes de cuivre, pendant 12 ans.

Mais tous ces développements doivent se faire sur le territoire du troupeau des caribous de Bathurst, dont la population s'est réduite comme peau de chagrin. Le dernier recensement, en 2009, faisait état de quelque 30 000 têtes.

Or, la mine à ciel ouvert, couvrant une surface importante, surgirait au milieu du territoire où les femelles mettent bas avant de partir vers le sud, et où le troupeau revient chaque année.

Les activités de la mine, le trafic de camions sur les nouvelles routes traversant leurs territoires ne pourront que perturber profondément la vie des caribous et notamment leur reproduction. Leur effet aggraverait la chute de la population vraisemblablement causée par la chasse, frappée il y a trois ans par une règlementation renforcée.

Les inquiétudes quant à l'impact que le complexe minier aurait sur les caribous sont nombreuses et Ottawa étudie actuellement les moyens de réaliser une étude dans une région si reculée.

Le gouvernement canadien pourrait également demander à MMG de modifier ses projets et d'organiser des débats publics avec des élus locaux et régionaux.

Le projet de MMG «pourrait avoir des conséquences particulièrement néfastes sur l'écosystème», a déjà averti le ministère fédéral de l'Environnement.

Le sort des caribous constitue «un des principaux enjeux» qui doivent être prix en compte, reconnaît Sally Cox, une porte-parole de MMG lors d'un entretien avec l'AFP.

La production pourrait débuter dès 2018 si les travaux préliminaires sont menés avant la fin du processus d'évaluation environnementale.

Avec la course aux matières premières, «tous les projets (miniers) faciles à mener ont déjà été réalisés», fait valoir Mme Cox. Dans ce contexte, conclut-elle, «nous nous attendons à devoir répondre à davantage de questions environnementales ou liées aux communautés».