Les océans ont beau couvrir 70 % de la planète, l'influence de l'activité humaine les touche de plusieurs manières. Mais malgré le perfectionnement croissant des modèles informatiques, on comprend encore mal le fonctionnement des océans, ce qui peut nous porter à noircir encore plus leur bulletin de santé.

Ce sont les deux principaux enseignements des conférences d'ouverture de «L'heure juste sur la santé des océans», colloque organisé par le réseau de recherche Québec-Océan pour son 10e anniversaire.

Réchauffement climatique, surpêche, acidification, géo-ingénierie, exploitation d'hydrocarbures, zones mortes, les menaces humaines sur les océans sont nombreuses, note Maurice Levasseur, océanographe à l'Université Laval et directeur général de Québec-Océan.

«Plusieurs de ces sujets se sont retrouvés dans l'actualité dans la dernière année, a-t-il dit à la centaine de scientifiques réunis pour l'occasion. Et c'est sans parler de l'ouragan Sandy. Il faudra prendre position sur ces enjeux.»

«Par exemple, avons-nous les connaissances pour nous lancer dans le développement des hydrocarbures dans le golfe et l'estuaire du Saint-Laurent? La réponse est non, selon moi.»

L'incertitude sur les connaissances des hautes mers a été bien illustrée par les deux premiers conférenciers.

John Fyfe, du Centre canadien de la modélisation et de l'analyse climatique, à Environnement Canada, a relaté les difficultés éprouvées par les scientifiques du monde entier à expliquer l'expansion de la banquise antarctique au cours des dernières années.

«Il faut absolument comprendre pourquoi, parce que c'est le genre d'information dont raffolent les climato-sceptiques», dit-il.

Selon ses toutes dernières recherches, non encore publiées, l'expansion de la banquise antarctique serait due principalement à la fonte de la glace continentale, qui se décharge dans l'océan en le refroidissant et en abaissant sa salinité, ce qui facilite la formation de glace de mer.

Un autre scientifique, Alain Babin, professeur de biologie à l'Université Laval, a fustigé les reportages donnant trop d'importance aux recherches affirmant que les «déserts océaniques» sont en expansion, peut-être à cause du réchauffement climatique. Il y a cinq zones désertes dans les océans et leur superficie a crû de 15 % entre 1998 et 2007.

Faute de données réparties sur une longue période, il faudra attendre le milieu du siècle pour savoir si c'est lié au réchauffement, a dit M. Babin. «Les déserts semblent vraiment s'étendre dans l'espace, mais il y a naturellement des variations et ce qu'on observe depuis 10 ans est à l'intérieur de cette variabilité naturelle.»