Le gouvernement agit dans la «précipitation» et «en catastrophe» pour maintenir sa politique de protection des milieux humides, selon des mémoires produits cette semaine au sujet du projet de loi 71.

Ce projet de loi d'une page se veut une réponse à un jugement rendu par la Cour supérieure au mois de mars dernier. Ce jugement invalide une directive adoptée par le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP) en 2006. En vertu de cette directive, en cas de demande de destruction de milieu humide de la part d'un promoteur, le Ministère pouvait exiger des compensations en nature, comme le don écologique d'un milieu naturel situé sur un autre terrain.

Le tribunal a annulé cette directive en affirmant qu'un «propriétaire ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est par voie d'expropriation faite suivant la loi pour une cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité». Le projet de loi 71 vise à donner une assise juridique à ces compensations sans indemnité. Y compris rétroactivement, pour celles qui ont été réalisées depuis 2006.

«Davantage de problèmes»

Dans un mémoire présenté hier dans le cadre de consultations particulières à l'Assemblée nationale, le Centre patronal de l'environnement du Québec (CPEQ) affirme que le gouvernement veut adopter «en catastrophe» une loi «qui créera davantage de problèmes qu'elle n'en réglera», Le CPEQ reprend les affirmations de la Cour supérieure: les compensations sans indemnité sont «une atteinte incontestable au droit de propriété».

Plus tôt cette semaine, le Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE) a lui aussi dénoncé «la précipitation et le fait qu'on soit contraint d'adopter de telles mesures dans un contexte d'urgence».

Cependant, le CQDE estime que le jugement de Cour supérieure pourrait être cassé en appel. «Certes, pour le propriétaire, le fait de se conformer à une réglementation visant à protéger l'environnement est une charge supplémentaire et lui occasionne des tracas et des dépenses additionnelles. C'est là simplement la rançon que tout propriétaire individuel doit payer pour la protection générale et collective de la nature», a affirmé en 1993 le juge de la Cour d'appel Jean-Louis Baudouin.