Les rapports sur la sûreté des installations nucléaires françaises, commandées par le gouvernement et l'Union européenne après Fukushima, présentent «des lacunes» dans l'évaluation des risques liés aux agressions et au vieillissement des centrales, selon la «contre-expertise» de Greenpeace rendue publique lundi.

«Les documents d'évaluation complémentaire de sûreté (ECS) devraient être révisés selon un cahier des charges plus complet qui inclut les agressions internes et externes», souligne le rapport établi pour le compte de Greenpeace par deux experts, l'Américain Arjun Makhijani, président de l'Institut pour l'énergie et la recherche environnementale (IEER) et le Français Yves Marignac, directeur de l'agence d'information et d'études sur l'énergie WISE.

Ils ont passé au crible les rapports d'EDF sur les centrales nucléaires de Gravelines, Civaux, Flamanville et du projet d'EPR, celui d'Areva sur le centre de traitement des déchets de La Hague et celui de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sur le parc français.

Les deux experts ont critiqué le fait que les évaluations soient «basées sur un état théorique des installations à la mi-2011 et ne prennent pas en compte le vieillissement qui augmente le risque de défaillance des dispositifs de sûreté et celui de rupture» d'équipements primordiaux comme la cuve et l'enceinte des réacteurs.

Ils déplorent que les évaluations n'aient «pas abordé la possibilité de recourir à des matériaux alternatifs» en particulier le zirconium, qui entre dans la composition des gaines de combustibles. «Le zirconium, rappellent les experts, joue un rôle central dans les accidents de fusion et la production d'hydrogène (provoquant des explosions) comme à Three Mile Island (1979) et Fukushima».

Les différences de conception des réacteurs selon leur puissance, avec une double paroi pour ceux de 1300 et 1450 MW et une simple paroi avec une peau métallique sur la surface intérieure pour ceux de 900 MW, posent également problème, selon les experts. Si la double paroi permet de mieux résister aux agressions externes, l'absence de peau métallique intérieure sur les réacteurs «est susceptible de les rendre plus vulnérables aux agressions internes comme une explosion d'hydrogène», indiquent-ils en regrettant qu'EDF n'ait «pas examiné les conséquences» de cela «en termes de robustesse».