Des écologistes «radicaux» financés par «des groupes d'intérêts spéciaux étrangers» espèrent faire déraper les tentatives du Canada pour vendre son pétrole dans de nouveaux marchés grâce au projet d'oléoduc Northern Gateway, a accusé le ministre fédéral des Ressources naturelles, Joe Oliver, dans une lettre ouverte diffusée lundi.

Un sondage commandé par plusieurs groupes écologistes laisse croire toutefois que les Britanno-Colombiens sont beaucoup plus inquiets du financement étranger de l'exploitation des sables bitumineux que du financement étranger des opposants.

Des experts en politique publique ont par ailleurs reproché au ministre Oliver d'ignorer dans sa lettre tous les Canadiens qui entretiennent des craintes dans ce dossier. Ils se demandent si Ottawa montre ainsi ses couleurs dans sa stratégie face aux écologistes et au processus d'application de la réglementation environnementale.

«Je suis consterné que le ministre en charge de l'Office national de l'énergie puisse, avec autant d'effronterie, diaboliser et discréditer la légitimité de voix canadiennes dans ce processus», a mentionné un politologue de l'Université de la Colombie-Britannique (UBC) qui se penche sur de tels sujets depuis plusieurs années, George Hoberg.

«C'est assez particulier qu'ils affirment ce genre de choses», a-t-il ajouté.

Le ministre Oliver soutient dans sa lettre que des groupes environnementaux radicaux et des célébrités tentent de détourner le régime réglementaire du Canada en vue de réaliser leur programme idéologique radical.

Les audiences réglementaires du projet de 5,5 milliards $ de la société Enbridge doivent débuter ce mardi à Kitimat, en Colombie-Britannique.

«Ils veulent faire obstacle à tout grand projet, quel que soit le coût pour les familles canadiennes, en termes de pertes d'emplois et de croissance économique. Pas de foresterie, pas d'exploitation minière, pas de pétrole, pas de gaz et pas de nouveaux barrages hydroélectriques», a écrit le ministre conservateur.

Les groupes visés par M. Oliver dans sa missive ont toutefois rétorqué lundi que c'est plutôt le Britanno-Colombien moyen qui s'oppose à la circulation de pétroliers au large des côtes de la province.

«Même si le premier ministre (Stephen) Harper et le ministre Oliver puissent penser que c'est dictature ou autre, c'est bel et bien une démocratie ici», a soutenu Will Horter d'un groupe vancouvérois défavorable au Northern Gateway, le Dogwood Initiative.

«Ces termes agressifs, auxquels ils ont recours avec quiconque est en désaccord avec eux, est représentatif de leur approche pour gouverner», a-t-il également lancé.

Les écologistes ont publié un sondage, mené en ligne auprès de 830 citoyens en avril dernier, qui suggère qu'environ 15 pour cent seulement des répondants sont préoccupés par le fait que les opposants canadiens au projet sont en partie financés par des groupes américains. Par contre, près de 75 pour cent d'entre eux se disent inquiets des investissements américains dans les ressources naturelles canadiennes.

Ils ont aussi renvoyé à une série de coups de sonde, effectués au cours des dernières années, qui laissent croire que les trois-quarts des citoyens sont opposés à la navigation de pétroliers au large de la Colombie-Britannique. La majorité de leur financement, disent-ils, provient de sources nationales: le Dogwood Initiative et le West Coast Environmental Law sont respectivement financés à 86 pour cent et 80 pour cent par des fonds canadiens.

Les écologistes ont par ailleurs souligné le fait que les milliers de dollars qu'ils reçoivent de groupes étrangers ne faisaient pas le poids face aux centaines de millions de dollars qu'empochent les pétrolières canadiennes et ce de partout à travers le monde, de la France en passant par la Chine.