Les divers ordres de gouvernement doivent intensifier leurs efforts pour modifier le comportement des consommateurs canadiens afin de les inciter à réduire leur consommation d'énergie.

Au moment où le prix de l'énergie continue de grimper et où la lutte au changement climatique doit être une priorité, la meilleure façon de s'attaquer à ces deux défis simultanément est d'instaurer parmi les Canadiens une culture de l'économie d'énergie.

C'est du moins la thèse que défend le Conseil canadien des chefs d'entreprise (CCCE) dans une étude publiée aujourd'hui. Dans le document de 34 pages, intitulé «Créer une culture de l'économie d'énergie», le CCCE rappelle que l'économie canadienne est déjà plus énergivore que la moyenne des pays de l'OCDE.

La consommation d'énergie par personne au Canada a augmenté de 5% depuis 1990 même si on est plus conscient que jamais des changements climatiques et d'autres enjeux environnementaux et que des percées technologiques intéressantes ont été réalisées, notamment en matière de transport.

La thèse de «l'effet rebond»

Mais la plupart du temps, ces percées technologiques n'ont pas conduit les Canadiens à réduire leur consommation d'énergie. Au contraire. Et le CCCE explique ce phénomène en soulignant la thèse de «l'effet rebond» avancée par plusieurs économistes, c'est-à-dire que les économies de coûts dans la consommation d'énergie plus efficace occasionnent une augmentation de la consommation ailleurs.

À titre d'exemple, les membres d'une famille qui ont remplacé leurs ampoules électriques à incandescence par des fluorescents compacts sont moins enclins à fermer les lumières parce qu'ils pensent qu'ils économisent déjà de l'argent. Une famille qui acquiert un véhicule hybride décide d'acheter une maison à la campagne, à plusieurs kilomètres de son domicile actuel, parce que sa voiture coûte moins à faire rouler.

La fiche canadienne (en matière de réduction de consommation d'énergie) n'est pas à la hauteur des attentes», estime le CCCE dans son étude.

À l'échelle du pays, la consommation d'énergie résidentielle a bondi de 14% de 1990 à 2008, même si les matériaux de construction sont de meilleure qualité et malgré l'arrivée d'appareils plus efficaces. C'est que les économies d'énergie obtenues ont été effacées par la construction de plus grands logements et la multiplication d'appareils, d'ordinateurs et d'équipements électroniques énergivores dans le foyer canadien moyen.

Le secteur du transport

À l'inverse, le secteur manufacturier utilisait 8% moins d'énergie et fabriquait 25% plus de produits en 2008 qu'en 1995. Cela n'étonne guère le CCCE, puisque pour beaucoup de ces entreprises, «les coûts d'énergie sont l'un des principaux éléments de leur chaîne de fabrication, alors que leurs économies d'énergie se traduisent immédiatement en bénéfices nets».

La plus forte croissance de la consommation d'énergie est survenue dans le secteur du transport, qui produit d'ailleurs 27% des émissions de gaz à effet de serre au Canada. De 1990 à 2008, le nombre de véhicules automobiles enregistrés au Canada est passé de 14,2 millions à 18,8 millions et le nombre total de kilomètres parcourus a augmenté de 37%. Pis encore, les Canadiens ont acheté 16 millions d'automobiles au cours de la dernière décennie, mais seulement 100 000 de ces autos étaient des véhicules hybrides.

Autres statistiques révélatrices: 82% des Canadiens se rendaient au travail en voiture en 2010, 12% seulement utilisaient le transport en commun, et 6% marchaient ou utilisaient leur vélo, selon une étude de Statistique Canada.

Pour le CCCE, les gouvernements ont un rôle crucial à jouer pour modifier les comportements des consommateurs. D'abord, l'instauration d'un prix pour le carbone permettrait aux Canadiens de bien saisir le coût réel de la production d'énergie.

Ensuite, le CCCE estime qu'Ottawa et les provinces doivent lancer une campagne de sensibilisation de la même ampleur que celles qu'ils ont menées au cours des dernières années pour réduire l'alcool au volant et convaincre les Canadiens de cesser de fumer.

Du même souffle, le gouvernement fédéral et les provinces devraient maintenir les programmes visant à donner un coup de pouce financier aux Canadiens qui désirent rendre leur domicile moins énergivore.

Les municipalités, quant à elles, devraient intégrer le principe de la consommation d'énergie durable à leurs plans d'urbanisme, notamment dans le zonage, la conception du paysage urbain et du transport, et les normes de construction des nouveaux bâtiments.

Enfin, les municipalités canadiennes devraient tenter de produire davantage d'énergie en utilisant les déchets, comme le font les villes européennes.