Les compagnies aériennes américaines ont plaidé mardi devant la justice européenne contre l'obligation de payer pour les émissions de CO2 de leurs avions imposée par l'UE sur son territoire pour lutter contre le réchauffement climatique.

L'Association des transporteurs aériens des États-Unis (ATA) a attaqué les dispositions européennes en introduisant en décembre 2009 un recours pour faire annuler leur mise en oeuvre au Royaume-Uni. La première audience pour plaider leur cause a eu lieu mardi.

La décision de la Cour de justice, qui interviendra dans plusieurs mois, est très attendue car l'Association des compagnies aériennes européennes (AEA) et le groupe Airbus contestent également cette obligation, assimilée à une taxe.

Le recours américain vise la décision de l'UE d'intégrer le transport aérien dans son système d'échange de quotas d'émission à compter du 1er janvier 2012, et ce pour tous les vols décollant d'Europe ou y atterrissant, y compris donc ceux de compagnies étrangères.

Tous les transporteurs aériens qui volent dans l'UE devront alors acheter 15% des droits à polluer - environ 200 millions de tonnes d'équivalent CO2 annuels - alloués au secteur.

«L'UE a adopté sa législation de manière unilatérale et n'a pas respecté ses obligations internationales qui imposent de régler ces questions par consensus dans le cadre de l'Organisation internationale de l'aviation civile, organisme reconnu par les Nations unies», a dénoncé l'avocat de l'ATA, Me D.Wyatt

«L'UE n'a pas compétence pour régir les conduites des compagnies aériennes des pays tiers», une réglementation contraire aux dispositions de la Convention de Chicago sur la souveraineté exclusive des États sur l'espace aérien au-dessus de leur territoire, a-t-il insisté.

Pour les compagnies américaines l'UE s'arroge le droit de taxer des vols qui assurent l'essentiel de leurs émissions en dehors de son territoire. Selon l'avocat, un avion parti de San Francisco pour Londres va dégager 29% de ses émissions de CO2 sur le territoire américain, 37% dans l'espace aérien canadien, 25% au-dessus de l'océan et seulement 8,7% dans l'UE.

La position de l'ATA a été soutenue mardi par le représentant de l'Association internationale du transport aérien (IATA).

La réglementation européenne déplaît également aux compagnies de l'UE et au groupe Airbus, car ils redoutent d'être pris dans une spirale de représailles.

La Chine a récemment évoqué de possibles rétorsions en cas d'application du système à ses compagnies. La menace pourrait se focaliser sur l'avionneur européen Airbus qui pourrait ainsi voir fondre son carnet de commandes en Chine.

Selon des informations de presse, pour faire pression sur l'UE Pékin bloque la signature d'une commande de dix gros porteurs A380, d'une valeur de 4 milliards d'euros au prix catalogue, qui devait être annoncée par la compagnie chinoise Hong Kong Airlines.

Les compagnies européennes considèrent en outre que «la mise aux enchères de "permis de polluer" s'apparente à un impôt déguisé, car la majorité des États de l'UE refusent de réinvestir ces revenus dans des projets à fort potentiel environnemental».

L'UE a déjà averti à plusieurs reprises qu'elle n'avait aucune intention de revenir sur sa législation entérinée en 2008 dans le cadre de son plan d'action à long terme sur le climat. À moins que les États-Unis et la Chine notamment adoptent des mesures semblables à celles de l'Europe pour lutter contre le réchauffement climatique.

«L'objectif de la directive européenne n'est pas de taxer les compagnies, mais de réduire les émissions» en poussant les compagnies à faire des efforts dans ce sens, a indiqué le porte-parole de la Commission européenne pour le climat, Isaac Valero Ladron.