Une «activité de routine», sans danger pour la santé ou l'environnement et qui ne crée pas de précédent. La Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) a vivement défendu, vendredi, sa décision très controversée de permettre le transport vers la Suède de 16 générateurs radioactifs par la voie maritime du Saint-Laurent.

La CCSN avait organisé une séance d'information technique à la demande du ministre des Ressources naturelles, Christian Paradis, pour tenter de calmer le jeu. «Les transports proposés sont parmi les plus sécuritaires à passer par le fleuve Saint-Laurent et se conforment à la réglementation de l'Agence internationale de l'énergie atomique, a indiqué André Régimbald, directeur général de la réglementation des substances nucléaires à la CCSN.

«Des millions d'expéditions de substances nucléaires ont lieu au Canada chaque année, a ajouté M. Régimbald. Par exemple, dans la région de Montréal, il y a chaque année plus de 9000 expéditions qui transitent par l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau, plus de 1000 expéditions qui transitent par le port de Montréal, et plus de 50 000 expéditions d'isotopes médicaux dans la ville. On ne crée pas de précédent, il s'agit d'une activité de routine.»

Les générateurs contiennent chacun plus de 100 tonnes d'acier, mais seulement 4 g de substance radioactive, ont assuré les représentants de la CCSN. Un «examen environnemental approfondi» a aussi été mené de façon concluante, a indiqué Patsy Thompson, docteure en toxicologie, directrice générale à l'évaluation et la protection environnementales.

La Commission maintient qu'elle a évalué tous les risques d'accident, jusqu'au pire des scénarios.

«On a étudié le scénario très peu probable où les générateurs se retrouveraient à l'eau et où l'ensemble des substances nucléaires qui les contaminent seraient relâchées dans l'eau, a souligné Mme Thompson. On l'a fait pour le Lac Ontario et le fleuve Saint-Laurent, pour regarder les conséquences sur les sources d'eau potable.»

«Les évaluations ont démontré que, dans tous les cas, les sources d'eau potable sont protégées, a-t-elle conclu. Il n'y a aucun scénario réaliste de contamination du fleuve et des Grands Lacs.»

À Ottawa, les députés de l'opposition, préoccupés par la décision, continuent de réclamer des explications.

«À partir du moment où l'on va permettre un transport, ça va être un précédent qui va amener à d'autres transports, a estimé le leader parlementaire du Bloc québécois, Pierre Paquette. Moi, je pense que la consultation qui a été faite par la Commission a été bâclée. Si même le gouvernement du Québec n'a pas été sensibilisé au fait qu'il allait y avoir ces audiences, je pense bien qu'il y a des citoyens qui n'ont pas eu la chance de se faire entendre. Je pense qu'on doit complètement mettre de côté ce projet.»

«Plus d'une centaine de maires du Québec et de l'Ontario sont très inquiets, préoccupés. Ça soulève encore beaucoup de questions, aux États-Unis et en Europe aussi», a renchéri Nathan Cullen, député du NPD.

Le libéral Denis Coderre estime que les parlementaires ont besoin de plus d'information: «Il y a anguille sous roche dans cette décision, qui a été annoncée en catimini un vendredi après-midi. Peu importe ce qu'on dira, je n'ai pas vu d'évaluation environnementale, on s'est fié aux données de Bruce Power. Il y a eu deux jours d'audience et l'on a pris une décision. J'aurais aimé voir une étude indépendante.»

Ainsi, le comité des ressources naturelles, à la Chambre des communes, a décidé de se pencher sur la question et doit entendre, en mars, les principaux intervenants, y compris la CCSN.

«Je partage les préoccupations des communautés riveraines. Il y a trop de choses cousues de fil blanc. C'est important d'aller chercher des réponses», a conclu M. Coderre.