Ottawa tente de calmer le jeu devant le tollé soulevé par la décision controversée de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) de permettre le transport de déchets nucléaires sur le fleuve Saint-Laurent.

À la demande du ministre des Ressources naturelles, Christian Paradis, la CCSN a annoncé qu'elle organiserait dans les jours à venir des séances d'information «pour corriger les informations trompeuses sur la sûreté et les incidences environnementales du transport proposé de 16 générateurs de vapeur déclassés à destination de la Suède».

Après plusieurs mois de consultations, la CCSN a délivré vendredi dernier un permis d'un an à l'entreprise ontarienne Bruce Power pour le transport de ses déchets nucléaires sur les Grands Lacs et la Voie maritime du Saint-Laurent. Elle a jugé que les risques pour la santé et la sécurité du public de même que pour l'environnement étaient «négligeables». Mais les critiques s'intensifient contre cette décision.

Les opposants s'affichent

«La liste des opposants s'allonge. On y compte plus d'une centaine de municipalités, dont la Ville de Montréal et celles de la Communauté métropolitaine de Québec, de même que le gouvernement du Québec et l'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Voilà maintenant que les autochtones, qui n'ont pas été consultés, réclament que l'on annule la décision de la Commission canadienne de sûreté nucléaire», a indiqué hier la députée du Bloc québécois Paule Brunelle.

Les bloquistes craignent que cette décision ne crée un précédent et n'augmente le risque d'incidents nucléaires.

«Le ministre des Ressources naturelles est-il conscient que cette autorisation pourrait être la première d'une série d'autres qui transformeraient à terme le Saint-Laurent en véritable autoroute pour les déchets nucléaires de l'Ontario et des États-Unis?» a demandé Mme Brunelle à la Chambre des communes.

Depuis une semaine, le ministre Paradis défend la décision de la CCSN, «une organisation quasi judiciaire indépendante du gouvernement».

«L'alinéa 48 de la décision indique clairement que le débit de dose de la surface extérieure d'un générateur de vapeur n'est pas plus élevé que celui d'un colis d'isotopes médicaux. Or, de tels colis sont livrés dans tous les hôpitaux du pays chaque jour», a argué le ministre Paradis, qui accuse les opposants de «jouer avec les perceptions».

Selon les bloquistes, c'est avant tout le processus d'évaluation de la CCSN qui est inadéquat. «Ses analyses reposent sur des chiffres donnés par Bruce Power, a souligné hier Gilles Duceppe. Ça met un gros doute.» Le NPD s'est aussi prononcé contre la décision de la Commission. Le député Nathan Cullen a rappelé qu'il s'agit de 1600 tonnes de déchets radioactifs et que «quelques heures d'audience» ne sont pas suffisantes pour appuyer un projet «qui pourrait mettre en péril la source d'eau potable de plus de 40 millions de personnes».