L'Afrique du Sud tente de «verdir» la Coupe du monde 2010 de football, grâce à une série d'initiatives localisées qui peineront à contrebalancer les énormes émissions de gaz à effet de serre de cette compétition au bout du monde.

Ventilation naturelle, récupération des eaux de pluies, économies d'énergie: les nouveaux stades construits pour ce premier Mondial africain (11 juin - 11 juillet) intègrent les principes de haute qualité environnementale (HQE).

Les villes de Johannesburg, du Cap (sud-ouest), de Durban (sud-est) ont également planté des milliers d'arbres pour capter le dioxyde de carbone (CO2), grand coupable du réchauffement climatique.

De manière plus ambitieuse, Durban s'est engagé à compenser intégralement les émissions locales de CO2 liées au Mondial, en produisant de l'électricité avec des turbines hydrauliques ou avec du biogaz issu de décharges.

Selon le système des «crédits carbone», ces projets compenseront en deux ans et demi les émissions de CO2 causées par la compétition dans l'agglomération, assure Nicci Diederichs, chargée des programmes verts de la municipalité.

2,75 millions de tonnes de CO2

Malgré tous ces efforts, la facture environnementale de cette grande messe sportive sera extrêmement salée pour le pays, avec une «empreinte carbone» estimée à plus de 2,75 millions de tonnes d'équivalent CO2, soit neuf fois celle du Mondial 2006, plus du double de celle des jeux Olympiques de Pékin.

La principale raison est géographique: les visiteurs étrangers réaliseront en tout 7,1 millions de kilomètres pour rallier l'Afrique du Sud, à la pointe du continent.

Même en excluant les transports internationaux, environ 900 000 tonnes de CO2 seront émises en interne. D'abord parce que, les villes-hôtes étant éloignées, l'avion restera le moyen de transport privilégié. Ensuite, parce que l'électricité sud-africaine est produite par des centrales à charbon très polluantes.

Pour les principaux intervenants de la lutte contre le réchauffement, le gouvernement a laissé la main aux acteurs locaux et n'a pas fait assez pour effacer l'ardoise.

La Fédération internationale de football (FIFA) avait «clairement dit qu'elle voulait un volet environnemental», rappelle Nicci Diederichs. «Mais au niveau national, rien ne s'est produit avant très longtemps et la responsabilité est revenue aux villes-hôtes.»

Inquiétudes

«L'Afrique du Sud et le comité local d'organisation ont communiqué massivement sur la Coupe du monde «verte», mais on n'a encore rien vu de tangible», renchérit Nkopane Maphiri, de Greenpeace Africa. «À 100 jours du coup d'envoi, on commence à être inquiet.»

Interrogé par l'AFP, le ministère de l'Environnement rétorque qu'il a «conduit la majeure partie du travail» sans être en mesure de citer un programme mené à terme.

Le gouvernement a lancé en novembre un appel de propositions pour des projets susceptibles de générer des crédits carbone. Seuls quatre ont été pré-sélectionnés et «ils ne sont pas réalisables en l'état», estime Nicci Diederichs.

«C'était un appel à l'aide très naïf», assène Anton Cartwright, coordinateur de l'organisation Promouvoir l'accès à une équité dans le carbone (PACE). «On ne peut pas espérer que des gens trouvent une solution en deux mois. Ils auraient dû lancer cette initiative il y a deux ans.»

Malgré tout, tempère-t-il, la Coupe du monde aura eu le mérite de mettre la question environnementale au premier plan. «Quand des étrangers demandent quelle est l'empreinte carbone du Mondial, cela entraîne une prise de conscience.»