Un pan de colline se détache et glisse sur des centaines de mètres dans un torrent de boue: en Italie, ce spectacle, diffusé en boucle à la télévision, risque de se reproduire souvent pour des raisons géologiques mais aussi à cause du développement urbain anarchique.

Toute cette semaine, des pluies torrentielles dans le sud de l'Italie ont entraîné des glissements de terrain imposants qui ont transformé en ville fantôme la localité de Maierato (2 000 habitants, tous évacués) en Calabre et vidé de la moitié de ses habitants celle de San Fratello (4 000 habitants) en Sicile.

«Il y aura toujours des glissements de terrain en Italie. Ce qui n'est pas acceptable pour un pays développé, c'est de voir ces glissements bloquer une autoroute ou toucher un pont ou un hôpital», a déclaré à l'AFP le géologue Leonello Serva.

Selon les experts, la densité de la population dans les zones à risques et l'absence de prise de conscience des dangers géologiques contribuent à provoquer régulièrement des catastrophes.

Selon l'ISPRA, un institut qui surveille les territoires à risque du point de vue géologique, 5% de la péninsule se trouve en zone rouge.

Mais «partout où il y a une pente en Italie, vous pouvez vous attendre à un glissement de terrain», a expliqué M. Serva, chef du département de la protection des sols à l'ISPRA, car la terre sur les innombrables collines et montagnes de la péninsule est «jeune d'un point de vue géologique».

Quelque 470 000 glissements de terrain se sont produits en Italie ces 50 dernières années, a rappelé l'ISPRA (Institut supérieur pour la protection et la recherche environnementale), qui précise que 70% des communes italiennes sont soumises à un risque élevé dans le domaine hydrotechnique.

Le territoire italien est rendu encore plus fragile par les abus, le déboisement et une urbanisation irrationnelle, selon les experts.

Les régions les plus à risques, selon l'expert, sont la Calabre et la Campanie ainsi que la Sicile.

«Nous avons eu des pluies incroyables, la terre est (déjà) fragile d'un point de vue géologique et les gens ont construit depuis 40, 50 ou 100 ans leurs maisons sur des terrains susceptibles de glissement», a déploré à la télévision Raffaele Lombardo, président de la Sicile.

En octobre dernier, un glissement de terrain dans la région de Messine (est de la Sicile) avait fait une trentaine de morts et plus de 700 sinistrés.

La presse et plusieurs experts avaient dénoncé l'urbanisation anarchique dans la région et le non respect des normes de construction, jugés responsables de la tragédie.

La pire catastrophe de ces dernières décennies s'était produite en 1998 lorsque la ville de Sarno, près de Naples, avait été engloutie par deux millions de mètres cubes de boue, faisant 160 morts.

L'absence d'information et de connaissance des règles d'utilisation des sols représente aussi un sérieux problème, a déclaré à l'AFP Francesco Dramis, professeur de géomorphologie à l'Université Roma 3.

«Il est urgent d'éduquer les gens à une utilisation correcte du sol et à la légalité», a dit M. Dramis.

Les bonnes habitudes dans la construction de maisons ou dans l'agriculture ont été négligées ou oubliées et ont aggravé les déséquilibres géologiques.

«Nous perdons la culture de la terre. Avant, il y avait beaucoup plus d'agriculteurs qui savaient ce genre de choses», a conclu M. Serva.