À l'issue de la dernière ronde de négociations avant la conférence internationale sur les changements climatiques, qui se tiendra à Copenhague en décembre, le Canada s'est vu décerner le prix «Fossile de la semaine» remis par les groupes environnementalistes au plus mauvais joueur.

Réunie toute la semaine à Barcelone pour discuter de l'après-Kyoto, la communauté internationale a fait peu de progrès dans les pourparlers, en raison de l'opposition de certains pays, les États-Unis notamment, mais aussi et surtout le Canada.

 

«Le Canada est devenu un cancre, un dernier de classe sur la scène internationale en matière de lutte contre les changements climatiques», a estimé Steven Guilbeault d'Équiterre, en entrevue téléphonique avec La Presse, de Barcelone.

Selon lui, le Canada compte sur l'échec de la conférence de Copenhague et n'arrivera à la table de négociations, dans un mois jour pour jour, qu'avec un «plan B».

Ottawa maintient ferme sa position d'utiliser 2006 comme année de référence, plutôt que 1990 comme la majorité des pays. Ses objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre sont aussi nettement inférieurs à ce que la communauté scientifique propose.

Des attentes réduites

Jeudi, le ministre de l'Environnement, Jim Prentice, avait affirmé à la Chambre des communes à Ottawa qu'il n'accepterait pas un traité international à n'importe quel prix. «Ce pays ne négociera jamais dans une position de faiblesse et ne se laissera pas entraîner dans des objectifs comme ceux de Kyoto», a dit M. Prentice.

Ottawa milite pour que soient prises en considération «les circonstances nationales» canadiennes, comme sa population croissante et sa structure industrielle énergivore. Depuis déjà quelques semaines, le ministre Prentice tente de réduire les attentes envers la conférence de Copenhague en affirmant qu'il serait peu probable d'en arriver à une entente, faute de temps.

Les environnementalistes ne sont pas du même avis.

«Les ministres qui disent que ce n'est pas possible, c'est parce qu'ils ne le veulent pas», a jugé Dale Marshall, de la Fondation David Suzuki, qui se trouvait aussi à Barcelone.

«Si le Canada décide de continuer à bloquer tout, c'est sûr qu'il n'y aura pas d'accord, a-t-il ajouté. Mais ce n'est pas vrai qu'il reste trop à faire. Ça prend seulement un changement de politique. Ça pourrait venir de la pression internationale, de la pression des citoyens, de la pression des ONG canadiennes, mais c'est encore possible.»

Grande responsabilité

Pour le député du Bloc québécois et critique en environnement Bernard Bigras, le Canada est largement responsable de l'échec des négociations en cours.

«Non seulement le Canada a tenté de saboter la conférence de Barcelone, mais il a échafaudé une stratégie qui risque de compromettre un accord à Copenhague et ça, c'est totalement inacceptable», a souligné M. Bigras.

Le Bloc, a-t-il dit, entend utiliser «tous les moyens» parlementaires mis à sa disposition pour tenter de faire fléchir le gouvernement sur la question.

«C'est un jeu pathétique, a pour sa part estimé le porte-parole libéral en environnement, David McGuinty. Il n'y a pas de plan au Canada. Il n'y a pas de réglementation. Il n'y a pas de mesures au Canada. Il n'y a rien. C'est impossible d'aller poursuivre des négociations à l'international quand on n'a pas un plan domestique.»