En retardant l'adoption d'un projet de loi du Nouveau Parti démocratique (NPD) qui vise à lutter contre les changements climatiques, le Parti libéral du Canada risque non seulement de contrarier les troupes de Jack Layton, mais aussi plusieurs groupes écologistes.

Selon le porte-parole et cofondateur d'Equiterre, Steven Guilbeault, les libéraux se feront certainement reprocher par l'ensemble de la communauté écologiste d'avoir renvoyé le projet de loi en comité parlementaire.

«C'est clair qu'ils (les libéraux) vont être dénoncés par l'ensemble des écologistes à l'échelle du pays. (...) Je pense qu'ils ont beaucoup plus à perdre qu'à gagner en appuyant le gouvernement conservateur là-dessus», a affirmé l'environnementaliste, en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

Cette opinion semble partagée par une quarantaine de groupes environnementaux, qui ont cosigné une lettre adressée aux députés fédéraux les appelant à appuyer le projet de loi C-311.

Endossée par des groupes comme Equiterre, la Fondation David Suzuki, Greenpeace, la Humane Society et Québec Kyoto, entre autres, la lettre a été distribuée à l'entrée de la Chambre des communes, mercredi matin.

Mais en fin d'après-midi, les libéraux - à l'exception d'une dizaine de dissidents - ont appuyé la demande des conservateurs, qui veulent renvoyer le projet de loi des néo-démocrates devant le comité de l'environnement, afin qu'il soit étudié plus longuement par des experts.

A peine quelques minutes après le vote, le Réseau action climat Canada, qui représente certains des groupes signataires de la lettre, a diffusé un communiqué pour dénoncer cette décision.

Le NPD espérait s'assurer que la Loi sur la responsabilité en matière de changements climatiques, qui fixe des cibles de réductions de gaz à effet de serre, soit adoptée avant la conférence internationale sur les changements climatiques qui se tiendra à Copenhague, en décembre.

Mais en vertu du vote de mercredi, le projet de loi devra désormais passer encore 30 jours ouvrables devant le comité parlementaire, soit jusqu'au 9 décembre, deux jours après le début de la conférence de Copenhague.

Le porte-parole du Parti libéral en matière d'environnement, David McGuinty, a expliqué, avant la tenue du vote, que le gouvernement devait consulter les autres pays, afin de tenir compte de la situation internationale.

«On doit apprendre beaucoup plus sur ce qui se passe dans les négociations pré-Copenhague. Ce n'est pas du tout une question de délai, c'est une question de s'assurer que le projet de loi reflète la réalité contemporaine», a-t-il fait valoir.

Une explication qui a été reprise par les conservateurs, lors de la période des questions.

«Il est important d'avoir une position cohérente en vue de Copenhague, ce que nous avons fait et ce sur quoi nous travaillons, avec les Etats-Unis, afin d'avoir une approche nord-américaine globale sur cette question», a dit le ministre de l'Industrie, Tony Clement, en réponse aux questions des néo-démocrates.

Mais comme l'ont rappelé les membres du NPD, les libéraux avaient appuyé leur projet de loi en 2008, avant qu'il ne meure au feuilleton une fois les élections déclenchées.

«Alors pourquoi ne pas prendre de l'action maintenant? Pourquoi créer un délai, qui fait en sorte que le Canada ne puisse pas avoir une politique forte et claire à présenter à Copenhague?», a critiqué le chef néo-démocrate, Jack Layton, à sa sortie des Communes.

Parce que la situation internationale a changé depuis, a rétorqué M. McGuinty, citant notamment le changement de cap des Etats-Unis avec l'arrivée du président Barack Obama.

M. McGuinty s'est défendu d'appuyer les conservateurs pour ne pas concéder une victoire aux néo-démocrates dans le dossier des changements climatiques.

Il a néanmoins avancé que le Parti libéral présenterait à son tour «les éléments clés d'un plan domestique et international». Car ni le NPD ni le Parti conservateur n'ont de plan pour faire face aux changements climatiques, selon lui.