Le réchauffement climatique modifie déjà les écosystèmes océaniques et terrestres provoquant des déplacements d'espèces animales ou menaçant leur survie, une situation qui nécessite des efforts accrus et urgents de préservation pour minimiser l'impact de ces bouleversements en cours, selon de nouvelles études.

«Nos recherches montrent que l'impact du changement climatique sur la biodiversité marine et les pêcheries va être énorme», a expliqué jeudi à la presse William Cheung, un biologiste de l'Université de Colombie Britannique à Vancouver (Canada). Il doit présenter ces travaux vendredi à la conférence annuelle de l'Association américaine pour la promotion de la science (AAAS) réunie à Chicago (Illinois, nord) jusqu'au 16 février.

Ce chercheur et des experts de l'Université de Princeton (New Jersey, est) et de East Anglia (Grande Bretagne) ont élaboré un modèle informatique permettant, pour la première fois, de calculer l'impact probable du réchauffement sur plus de mille espèces de poissons dans le monde.

Ils ont pu prédire exactement, selon différents scénarios climatiques, la répartition d'espèces de poissons et de crustacés commercialement importantes comme la morue, le hareng, le mérou et les crevettes d'ici 2050 et au-delà.

Leur étude prédit une vaste redistribution des espèces, la plupart d'entre elles se déplaçant de plus de 40 kilomètres par décennie vers le nord et entraînant de lourdes pertes en prises de poissons pour les pays en développement des tropiques.

Actuellement les pêcheries et les efforts de préservation ne prennent pas en compte ce changement dans la distribution géographique des espèces marines, a relevé William Cheung, espérant que ces modèles de projection vont tirer la sonnette d'alarme.

«Nous devons agir maintenant pour adapter la gestion de nos pêcheries et les politiques de protection de l'écosystème afin de minimiser les dégâts sur la vie marine et la société humaine», a insisté le biologiste.

L'impact du réchauffement combiné à la surpêche a aussi des effets dévastateur sur les manchots de Magellan au bout du monde sur les côtes argentines, a expliqué lors de cette même conférence de presse Dee Boersma, professeur de biologie à l'Université de Washington à Seattle (nord-ouest).

Ces bouleversements forcent ces manchots à nager de plus en plus loin pour trouver de la nourriture, une contrainte qui menace toute l'espèce, selon des travaux qu'elle doit présenter vendredi lors d'un symposium à la conférence du AAAS.

Elle a étudié pendant plus de 25 ans une colonie de manchots de Magellan à Punta Tombo en Argentine et constaté qu'elle a fondu de plus de 20% depuis 22 ans, laissant seulement 200 000 couples capables de se reproduire.

«Je pense que les manchots sont comme des sentinelles des océans en nous révélant des changements dans l'environnement marin mais aussi terrestre», a dit Mme Boersma.

Pour Emily Pidgeon, de Conservation International, groupe privé américain de protection de la bio-diversité, «les effets du réchauffement altèrent déjà drastiquement la distribution et l'abondance de la biodiversité marine mondialement».

«Ces changements en cours auront de graves conséquences pour le milliard ou plus de personnes dépendant des ressources de l'océan pour vivre», a-t-elle noté.

«L'écosystème océanique que nous chérissons sera fondamentalement différent dans les prochaines décennies quoi qu'on fasse... confortant le besoin de préserver la diversité de la vie dans les océans, base même de la sauvegarde de l'environnement», a expliqué Emily Pidgeon lors de la même conférence de presse.