Pour des raisons environnementales et de santé publique, une trentaine de médecins québécois réclament l'abandon du projet de réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2.

Dans une lettre envoyée au grand patron d'Hydro-Québec, Thierry Vandal, le docteur Éric Notebaert et ses 34 cosignataires demandent un moratoire «immédiat» sur ce projet ainsi que la mise sur pied d'une enquête publique, afin que tous soient entendus sur ce «choix de société absolument fondamental».

 

L'instigateur de cette intervention publique est le Dr Notebaert, urgentologue et professeur au département de médecine familiale de l'Université de Montréal. Expert qui est intervenu auprès de commissions provinciales et fédérales sur les risques associés à l'énergie nucléaire, il est également chercheur en toxicologie et président de Health Professionals for Global Survival.

Datée du 30 octobre dernier, la missive d'une page contient un résumé des principales raisons ayant poussé ces médecins à intervenir publiquement contre cette «décision totalement injustifiée».

On évoque d'abord des questions de santé. Citant deux études récentes qui ont «démontré une incidence de cancers et surtout de leucémies particulièrement élevée en périphérie de plus de 136 centrales nucléaires dans le monde», les médecins se disent «vivement inquiets».

D'autant, ajoutent-ils, que les réacteurs CANDU, comme celui en exploitation à Gentilly, libèrent du tritium en «quantité dangereuse». Cette eau radioactive se retrouve ensuite dans les nappes phréatiques, dans le lait des vaches et dans des légumes de cette région située à quelques kilomètres de Trois-Rivières.

Les médecins évoquent aussi des questions environnementales et de sécurité. «Doit-on rappeler que l'on n'a pas encore à ce jour une solution adéquate et totalement sécuritaire de gestion des déchets nucléaires nulle part dans le monde? Ceux-ci continuent donc à s'accumuler sur le site de la centrale et constituent un risque sérieux d'accidents», déplorent-ils.

On rappelle enfin que pour fonctionner, les centrales nucléaires nécessitent de l'uranium, une matière non renouvelable. On estime que les stocks actuels ne dureront que quelques dizaines d'années, après quoi il faudra fouiller les fonds marins, au détriment de leurs écosystèmes.

«Investir dans le nucléaire c'est investir dans une technologie coûteuse, dangereuse, et qui ne durera que peu de temps, peut-on lire. Il serait de loin préférable d'investir dans les énergies renouvelables, beaucoup moins coûteuses et certainement plus sécuritaires sur le plan de la santé et de l'environnement.»

Le Dr Notebaert fait partie de la coalition Sortons le Québec du nucléaire, qui a lancé sa campagne à Montréal il y a quelques semaines. Piloté par des artistes et quelque 40 groupes écologistes, cet organisme arc-en-ciel déplore que le gouvernement Charest ait donné son feu vert, en plein milieu de l'été dernier, à ce projet évalué à 1,9 milliard de dollars.

En raison de la menace d'un accident nucléaire, des coûts prohibitifs de la réfection et des dangers posés à la santé par les émissions de polluants radioactifs dans l'air et l'eau, la coalition réclame elle aussi l'abandon du projet.