Les eaux contaminées d'un dépotoir se sont déversées dans le Saint-Laurent à La Prairie, le 13 juillet, vraisemblablement en raison des fortes pluies. Bien que ce tronçon du fleuve soit fréquenté par des baigneurs, des plaisanciers et des pêcheurs, la direction de la Santé publique n'a pas cru nécessaire d'émettre d'avertissement.

Le 4 août, une équipe de scientifiques du ministère des Ressources naturelles et de la Faune a découvert entre 300 et 500 poissons morts qui flottaient le long des berges du fleuve et à l'embouchure d'un de ses affluents, la rivière Saint-Jacques.

Selon la direction de la Santé publique de la Montérégie, la mort de ces poissons aurait probablement été causée par des écoulements de lixiviat - communément appelé «jus de vidange» - provenant du dépotoir de matériaux de construction A. Stabile, à La Prairie.

«C'est l'hypothèse la plus plausible à l'heure actuelle, explique le directeur suppléant de la Santé publique de la Montérégie, Daniel Nadeau. Les fortes pluies des derniers temps auraient fait déborder le jus de vidange dans les fossés, qui se serait ensuite déversé dans les égouts, puis dans le fleuve.»

Le président du site d'enfouissement A. Stabile, Gaétan Stabile, a confirmé que le débordement de lixiviat contenait du sulfure d'hydrogène, un gaz qui étouffe les poissons.

«C'est dangereux pour les poissons, mais pas pour les êtres humains, a assuré Daniel Nadeau. Il est important de préciser que les poissons seraient morts à la suite d'un événement ponctuel, parce qu'ils ont eu un choc. L'impact sur l'écologie aquatique devrait être minime parce que le sulfure d'hydrogène se dissout dans l'eau.»

Selon Steve Garceau, biologiste au ministère des Ressources naturelles et de la Faune qui a participé au recensement des poissons morts, leur nombre est sans doute plus élevé.

«Lorsque nous sommes arrivés, ils étaient déjà morts depuis quelques jours, précise-t-il. Ceux qui n'avaient pas la vessie gazeuse ont coulé et les goélands sont passés avant nous. Malgré cela, c'est rare de voir une mortalité aussi massive.»

Problème ponctuel?

Cinq ministères planchent présentement à élucider les circonstances précises de la mort des dorés jaunes, des grands brochets du Nord, des perchaudes, des carpes, des crapets, des anguilles, des meuniers et des chevaliers.

Au ministère du Dévelop-pement durable, on a préféré attendre les résultats de l'analyse des carcasses avant de se prononcer sur la cause de leur mort.

«Nous ne sommes pas prêts à effectuer une corrélation de cause à effet, dit le directeur du Centre de contrôle environnemental de la Montérégie, Émile Grieco. Mais c'est sûr que nous avons un soupçon que ce pourrait être le déversement.»

Pour sa part, Gaétan Stabile est persuadé que le déversement de lixiviat de son dépotoir n'est pas lié à la mort des poissons.

«Le débordement n'était pas assez important, dit-il. Nous avons eu un bris de tuyau, la pompe a cessé de fonctionner, il y a eu un débordement et ça sentait les oeufs pourris. C'est tout. Après trois jours, nous avons réglé le problème.»

Les résultats des analyses des carcasses devraient être disponibles d'ici quelques jours. En attendant, Émile Grieco a tenu à préciser qu'un autre déversement n'allait pas se reproduire.

«Le ministère du Développement durable a fait installer un système qui traite l'eau du dépotoir avant de la rejeter dans les égouts municipaux.»