Le premier ministre de l'Ontario, Dalton McGuinty, a annoncé lundi que l'exploitation forestière et minière sera prohibée sur une vaste portion de la forêt boréale du nord de la province. Cette mesure garantira aussi aux autochtones des régions concernées une part des recettes de l'exploitation des ressources.

M. McGuinty a fait savoir que son gouvernement consultera l'industrie, les environnementalistes, les communautés autochtones et les autres résidants pour élaborer un plan de 10 à 15 ans destiné à soustraire la moitié de la forêt boréale de la province de toute activité commerciale.

«C'est la plus vaste forêt intacte au Canada et le troisième milieu humide en importance au monde», a déclaré M. McGuinty à propos de la forêt boréale ontarienne.

Située au nord du 51e parallèle, la région protégée mesure 225 000 kilomètres carrés - la superficie combinée de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de l'Ile-du-Prince-Édouard. Seulement 24 000 personnes y habitent, alors qu'elle couvre pas moins de 43 pour cent de la superficie entière de la province.

Le nouveau plan obligera les compagnies minières et forestières à consulter les autochtones longtemps avant de démarrer quelque nouveau projet que ce soit dans l'autre moitié de la forêt boréale ontarienne, et à accorder aux premières nations une part des revenus de nouveaux projets lancés sur leurs terres traditionnelles, où qu'elles soient en Ontario.

Le grand chef de la nation nishnawbe-aski, Stan Beardy, s'est dit encouragé par le projet, mais il a ajouté qu'il était «absolument essentiel» que le plan garantisse le partage des recettes de l'exploitation des ressources avec les communautés autochtones. «Nous avons un traité avec la Couronne depuis une centaine d'années et nous n'avons absolument pas profité des revenus des ressources», a-t-il déploré en entrevue.

L'exploitation minière a produit des revenus d'environ 11 milliards $ en Ontario en 2007. Et M. McGuinty s'est dit confiant que les consultations sur la nouvelle zone protégée ne nuiront pas à ce secteur en expansion.

Les partis d'opposition ont soutenu que l'annonce de M. McGuinty pourrait décourager des entreprises de faire de nouveaux investissements dans les secteurs miniers et forestiers dans le Grand Nord, en créant de l'incertitude au sujet des futures règles - une préoccupation qui rejoint celle des associations industrielles.

Le président de l'association des industries forestières de l'Ontario, Jamie Lim, a déclaré que les entreprises qui voudraient investir ne sauront pas à quoi s'attendre pendant 13 à 15 ans. L'association minière de l'Ontario a reconnu qu'il faudra peut-être autant de temps pour identifier le potentiel minéral, les caractéristiques environnementales et les espèces vulnérables de la région. Son président, Chris Hodgson, a déploré le manque de détails de l'annonce du premier ministre.

L'an dernier, 1500 scientifiques de 50 pays ont lancé un appel à tous les gouvernements canadiens - fédéral, provinciaux et territoriaux - pour qu'ils protègent les 5,6 millions de kilomètres carrés de forêt boréale canadienne, considérée comme le plus vaste réservoir de carbone au monde, et qui contient 186 milliards de tonnes de carbone. Cela équivaut à 27 années d'émissions mondiales de carbone provenant de l'utilisation de combustibles fossiles.

Des environnementalistes ont qualifié l'annonce de M. McGuinty de «visionnaire», affirmant qu'elle est cruciale pour protéger l'environnement et lutter contre le réchauffement climatique.