(Montréal) La candidate de Québec solidaire (QS) dans la circonscription de Camille-Laurin, Marie-Eve Rancourt, qui a été filmée par la caméra de sécurité d’une maison alors qu’elle subtilisait d’une boîte aux lettres un dépliant du Parti québécois (PQ) pour le remplacer par le sien, retire sa candidature.

« Ce n’est pas une décision qui est prise de gaieté de cœur, mais j’ai dit à Marie-Eve qu’elle avait pris la bonne décision. C’est une décision que j’appuie. Marie-Eve ne souhaitait pas devenir une distraction pour la campagne de Québec solidaire », a déclaré lundi le co-porte-parole du parti, Gabriel Nadeau-Dubois.

Mme Rancourt, qui est avocate et titulaire d’une maîtrise en droit international et politique internationale, avait préalablement présenté ses excuses sur son compte Twitter, tout en laissant entendre qu’elle restait dans la course.

« Cela n’aurait jamais dû arriver. Tous les candidats ont leur place dans cette course et je m’engage à finir ce sprint électoral dans le respect et les règles de l’art », a écrit Mme Rancourt. Le candidat du PQ qui se présente dans sa circonscription est le chef de la formation politique, Paul St-Pierre Plamondon.

Plus tôt lundi après-midi, dans un bref échange avec La Presse, Marie-Eve Rancourt affirmait qu’elle était toujours candidate pour Québec solidaire. Que s’est-il passé entre cette déclaration et l’annonce de son retrait de la campagne électorale ?

L’après-midi a été plein de rebondissements. Il y a eu différentes discussions dans les différentes équipes de travail. […] La conclusion, c’est que la meilleure chose à faire, c’était pour Marie-Eve de retirer sa candidature.

Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de Québec solidaire

« Je pense que le message est clair. Ce n’est pas des gestes qui sont acceptables à Québec solidaire. D’ailleurs, Marie-Eve s’est excusée très rapidement de ces gestes-là. Elle s’est excusée de sa grave erreur de jugement. Elle savait elle-même que c’était inacceptable. Elle n’a pas cherché une seconde à minimiser la portée de ses gestes », a-t-il ajouté.

Un geste « immoral », dit St-Pierre Plamondon

En sortant de l’avion qui le ramenait des Îles-de-la-Madeleine, où il est allé constater les dégâts de la tempête Fiona, lundi, le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, a affirmé qu’une telle situation ne serait pas excusée si elle survenait dans son parti.

« J’accepte les excuses, mais la signification du geste demeure la même. […] C’est à [Québec solidaire] de déterminer quelle est la réaction appropriée par rapport à un geste qui est immoral, antidémocratique. Si c’était au Parti québécois, puis qu’une candidate ou un candidat posait un geste comme celui-là, je pense que je rencontrerais la personne pour dire “je suis désolé, mais tu ne peux plus faire partie de l’équipe” », a-t-il dit.

« Les candidats de Québec solidaire savent bien qu’on veut faire des campagnes fair-play, qu’on veut faire des campagnes dans les règles de l’art », a pour sa part affirmé Gabriel Nadeau-Dubois. Ce dernier a tenté de joindre Paul St-Pierre Plamondon pour lui présenter les excuses du parti et ses excuses personnelles.

Selon le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), prendre sans autorisation le contenu d’une boîte aux lettres, comme dans ce cas-ci un dépliant qui ne nous est pas destiné, constitue une infraction au Code criminel.

« C’est un vol. Pour les vols de 5000 $ ou moins, c’est l’article 334 b) [du Code criminel] qui s’applique. En ce qui a trait aux conséquences légales, nous vous invitons à communiquer avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) », a affirmé le corps de police montréalais. Selon Québec solidaire, aucune plainte formelle n’aurait été déposée contre Marie-Eve Rancourt.

Un tournant majeur dans Camille-Laurin

Le retrait de la candidature de Marie-Eve Rancourt pour Québec solidaire à quelques jours de l’élection marque un tournant majeur dans la campagne électorale pour cette circonscription de l’est de Montréal. Selon la dernière mise à jour du site de projections électorales Qc125, le candidat de la Coalition avenir Québec (CAQ) et député sortant, Richard Campeau, menait la course. Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, arrivait en deuxième position, suivi de près par Mme Rancourt. Son retrait brasse toutefois les cartes et il devient encore plus difficile de prédire l’issue du scrutin.

« Une personne candidate peut retirer sa candidature en tout temps avant la fin du scrutin. Elle doit alors remettre au directeur du scrutin un écrit signé signifiant qu’elle se retire de la course. Si les bulletins de vote sont déjà imprimés, le nom de la personne candidate sera rayé à la main et tous les électeurs à qui le bulletin sera remis en seront informés », a expliqué à La Presse une porte-parole d’Élections Québec.

Or, le vote par anticipation est commencé au Québec et des électeurs pourraient avoir déjà voté pour la candidate solidaire. « Dans ce genre de situation, si une personne candidate se désiste alors que des votes ont déjà eu lieu, les votes qu’elle a recueillis sont annulés », a ajouté Élections Québec.