(Longueuil) François Legault y croit dur comme fer : selon lui, il est impossible que le Québec devienne carboneutre d’ici 2050 sans construire de nouveaux barrages hydroélectriques.

Le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ) a annoncé mardi qu’il mandatait Hydro-Québec d’évaluer l’opportunité de construire de nouveaux barrages et de lui revenir « dans les prochains mois » avec des propositions. M. Legault souhaite même accélérer leur développement, qui prend en moyenne entre 10 et 15 ans.

Mais sa proposition, qu’il annonçait comme le « chantier le plus important dans l’histoire du Québec », a rapidement été critiquée, à la fois par ses adversaires, mais aussi par des experts en matière d’énergie.

« On ne peut pas dire : "je veux que le Québec devienne carboneutre, mais je ne veux pas de barrage". Ce n’est pas vrai qu’avec l’efficacité énergétique et l’éolien qu’on va être capable de remplacer 50 % de l’énergie qu’on consomme au Québec dans les transports et dans les industries », a-t-il répliqué mercredi.

M. Legault a également minimisé les craintes exprimées mardi par le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL), Ghislain Picard.

« Il y a des retombées économiques énormes associées aux barrages. On va travailler avec les communautés autochtones qui sont visées précisément, pas avec l’ensemble que représente M. Picard », a-t-il affirmé.

Analyser tous les scénarios

Ces déclarations du chef caquiste suivent de nombreuses mises en garde exprimées par des experts dans La Presse et dans plusieurs médias au sujet du plan de la CAQ.

« Mettre de l’avant ou prioriser une solution, c’est une erreur. Il y a plein d’avenues possibles. On sait aujourd’hui qu’il y a une panoplie de technologies pouvant être intéressantes. On se doit d’étudier l’hydroélectricité, mais aussi l’éolien, le solaire, la géothermie, même le nucléaire. Et si ça se trouve à être l’hydroélectricité, alors on ira. Mais documentons d’abord », a par exemple affirmé le professeur Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire en énergie de HEC Montréal.

« On ne peut plus inonder des territoires comme on l’a fait par le passé, pour les raisons environnementales et d’acceptabilité sociale qu’on connaît. Ça fait en sorte qu’on ne pourra pas avoir beaucoup de réservoirs, et qu’on aura donc moins de flexibilité », a également commenté Normand Mousseau, directeur scientifique de l’Institut de l’énergie Trottier de Polytechnique Montréal.

Mais pour François Legault, ces experts ne saisissent pas l’ampleur de la demande exprimée par les industries auprès du ministre sortant de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

« Juste pour vous donner un ordre de grandeur, Hydro-Québec produit par année 200 térawattheures d’électricité. Quand on regarde la liste [des projets des entreprises qui s’en viennent], on va avoir besoin de 100 térawattheures de plus. Il ne faut pas être comptable pour comprendre : ça veut dire qu’il va falloir construire un demi-Hydro-Québec dans les prochaines années. Ce n’est pas un petit mandat », justifiait-il mardi.

Pour sa part, Hydro-Québec a répondu à La Presse que la société d’État ne commentait pas les promesses électorales faites par chaque parti.

Avec Henri Ouellette-Vézina

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