(Montréal et Sherrington) La Coalition avenir Québec (CAQ) veut augmenter la place du privé en santé en lançant un appel de projets pour construire deux nouveaux centres médicaux privés à mi-chemin entre un groupe de médecine familiale (GMF) et un hôpital pour y traiter des cas mineurs qui n’ont pas besoin d’aller aux urgences.

Ces nouveaux centres, qualifiés samedi de « mini-hôpitaux » privés, seraient situés à Montréal et à Québec. On y trouverait un groupe de médecine familiale (GMF) ouvert sept jours sur sept, des urgences accessibles en permanence pouvant traiter des problèmes mineurs qui n’exigent pas une hospitalisation et des salles d’opération pour des interventions en chirurgie d’un jour, entre autres. Les services offerts seraient couverts par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).

Ainsi, si la CAQ forme le prochain gouvernement le 3 octobre prochain, un appel de projets serait lancé et ces deux nouveaux centres privés pourraient accueillir leurs premiers patients en 2025. Leur construction coûterait 35 millions chacun, prévoit le parti de François Legault. Ce montant serait entièrement financé par le privé, a-t-on précisé.

Toutefois, ces nouveaux « mini-hôpitaux » auraient accès au même modèle de financement que celui qui encadre les GMF, qui sont aussi privés.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux a une entente avec les propriétaires privés des GMF pour subvenir à une partie de leurs frais fixes.

Christian Dubé, ministre de la Santé et candidat caquiste dans la circonscription de La Prairie

En fin d’après-midi, samedi, François Legault a assuré qu’il était « totalement exclu » que les deux nouveaux centres médicaux privés accueillent simultanément entre leurs murs des patients qui paient de leur poche pour obtenir des services et ceux dont les soins sont couverts par la RAMQ. Tous les services offerts seront couverts par le public, a-t-il promis.

Objectif : décharger les urgences

En construisant ces deux nouveaux centres au cours d’un éventuel second mandat (il pourrait y en avoir à terme « une dizaine », a précisé la CAQ, si le modèle se révèle efficace), François Legault promet de réduire les temps d’attente aux urgences.

« Les urgences des hôpitaux restent encore trop souvent la principale porte d’entrée pour les patients, car ils n’ont pas d’autre choix. Ils ont besoin de soins, mais leur état de santé n’exige pas nécessairement l’accès à des plateaux techniques et à des services aussi spécialisés que ceux des centres hospitaliers, ce qui contribue à embourber le réseau », explique le parti.

Il manque parfois un type d’établissement à mi-chemin entre le GMF et l’hôpital, pour les patients qui ont besoin de soins, mais pas nécessairement à l’urgence. […] Ces services de proximité, développés et gérés par le privé, permettront de réduire la pression sur les hôpitaux.

Coalition avenir Québec

« Si on est capable d’enlever le plus possible les [cas mineurs] qui viennent aux urgences et qui ne devraient pas être là [en les prenant en charge] soit dans les GMF, soit dans [ces nouveaux centres privés], on diminuerait de 30 à 40 % l’achalandage dans nos urgences. C’est énorme, ça ! », a plaidé Christian Dubé.

Et combien de temps les Québécois devront-ils attendre en moyenne dans ces « mini-hôpitaux » privés ? « Dans l’appel [de projets] qu’on va faire, on va leur dire : “Vous devez avoir un assez grand nombre de médecins, d’infirmières et de professionnels pour nous donner des temps d’attente qu’on juge raisonnables” », a-t-il dit.

Virage à droite

Pour le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, il s’agit d’une autre démonstration du « virage à droite » de la Coalition avenir Québec, qui serait inspiré par Éric Duhaime et son Parti conservateur (PCQ).

M. Legault prend un virage à droite, vers le privé en santé, alors qu’on sait que ça ne marche pas, et je pense qu’il fait ça parce qu’il est de plus en plus influencé par Éric Duhaime.

Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

Le chef conservateur a pour sa part souligné que « voir tranquillement la CAQ considérer [comme] un peu moins tabou le “mot en P”, c’est une bonne nouvelle ». Le PCQ propose de son côté de permettre aux Québécois d’adhérer à une assurance complémentaire pour recevoir des soins au privé. « Pour les gens qui seront sur une liste d’attente pour une chirurgie dans le système public, ils seront référés dans un établissement privé après une certaine période considérée comme non raisonnable pour y être soignés, et c’est l’État qui en paiera tous les frais », propose le parti.

Avec Charles Lecavalier, La Presse