Ils aspirent à devenir premier ministre. Dans quelques jours, ils parcourront le Québec pour convaincre les électeurs de leur donner leur confiance. La Presse les a rencontrés. Aujourd’hui, la cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade.

(Québec) Dominique Anglade jette les gants à quelques jours du déclenchement des élections. La cheffe libérale accuse la Coalition avenir Québec (CAQ) de vouer un « culte de la personnalité » à François Legault, ce qui « masque les vrais enjeux » auxquels le Québec doit s’attaquer.

« On va nous annoncer bientôt qu’il va transformer l’eau en vin », décoche la leader libérale. Attablée dans un petit resto du Grand Marché de Québec, Dominique Anglade n’en revient pas de la campagne publicitaire de la CAQ qui tourne autour du leadership de François Legault — un choix révélateur, selon elle.

Le concept est presque toujours le même : la publicité s’ouvre avec le plan d’un micro, puis un candidat explique pourquoi il fait confiance au chef de la CAQ.

« Je pensais que c’était une parodie », lance Dominique Anglade, évoquant d’emblée la publicité où la candidate dans Viau, Justine Savard, raconte que sa fille a fait ses premiers pas en marchant vers François Legault – une vidéo que la CAQ a retirée depuis. La cheffe du Parti libéral du Québec (PLQ) n’y voit qu’une explication : « c’est un culte de la personnalité ».

« Pendant ce temps-là, on n’est pas en train de parler de tous les professeurs qui vont manquer à la rentrée […], des gens qui ont perdu leur médecin de famille, de la criminalité qui monte à Montréal », plaide-t-elle.

Ce culte de la personnalité masque le bilan de la CAQ et masque surtout le manque de vision totale pour la suite des choses.

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec

Ce « culte » voué à François Legault expliquerait même, selon elle, le saut des recrues comme Caroline St-Hilaire et Martine Biron, qui avaient critiqué le troisième lien Québec-Lévis et qui maintenant l’appuient. « Les ambitions avant des convictions », résume Dominique Anglade.

« Qu’est-ce qui les unit ? Le culte de la personnalité, la magie. C’est ça, on est dans une espèce de mirage qui tient encore à ça », répond-elle.

« La chaise vide, non merci ! »

Elle reproche par ailleurs à François Legault la décision de n’accorder aucune entrevue de précampagne, dont avec La Presse dans le cadre de cette série. « Ce ne sera jamais ma conception de la politique », assure Mme Anglade.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

En entrevue avec La Presse, Dominique Anglade insiste sur l’importance de parler des « vrais enjeux » et de s’exposer aux questions difficiles de la population.

« C’est un gouvernement qui a oublié de connecter avec la population », martèle-t-elle. « Heille, il faut être arrogant pas pire pour refuser le débat de l’Institut du Nouveau Monde [qui s’est tenu vendredi dernier], le débat sur l’environnement, le débat anglophone », énumère la cheffe libérale.

N’aurait-elle pas fait de même si un gouvernement Anglade trônait au sommet des sondages ? « Non, non, ce ne sera jamais ma personnalité. » Elle rappelle qu’à titre de ministre de l’Économie, en 2017, elle avait accepté l’invitation de Tout le monde en parle pour commenter les hausses salariales de Bombardier, à qui le gouvernement Couillard venait de consentir de nouveaux fonds publics.

« Les gens me disaient : ‟Dominique, il ne faut pas que tu y ailles.” […] Tu penses ? Je vais y aller, moi. La chaise vide, non merci ! »

Elle se targue d’avoir organisé des « town hall », genre d’assemblées de cuisine, « partout où elle est allée » cet été. Un exercice où elle pouvait prêter flanc à la critique et devait répondre à « des questions vraiment pas faciles » de citoyens.

« C’est ce qu’on doit faire si on veut ramener le monde sur les enjeux réels et trouver des solutions. Je sais que je m’expose, mais c’est inconcevable dans la situation dans laquelle on se trouve de tout faire pour garder le pouvoir et d’en faire le moins possible », dit-elle, renvoyant une pointe à son adversaire caquiste.

Dominique Anglade y reviendra à plusieurs reprises pendant l’entretien : la CAQ est un gouvernement « de comm », comme « un décor de théâtre », qui ne s’intéresse pas aux « vrais enjeux ». La libérale cherche ainsi à placer sa proposition « votez vrai, vrais enjeux, vraies solutions » en opposition au bilan caquiste.

Elle promet de s’attaquer en priorité à la crise du coût de la vie avec une baisse d’impôts et une allocation récurrente pour les aînés, notamment. Le PLQ ramènerait la promesse « abandonnée » de la CAQ de doter tous les Québécois d’un médecin de famille, et ce, d’ici cinq ans. Et miserait sur son « projet ÉCO », qui prévoit la nationalisation de l’hydrogène vert, pour créer de la richesse.

« L’économie va bien ? », lance-t-elle, reprenant le discours de la CAQ. « Tu engranges des fonds et tu ne réponds pas aux besoins de la population, et assis sur ton steak, tu regardes ça en te disant que l’économie va bien, que le taux de chômage est bas. Voyons ? Il n’y a personne [pour travailler], le taux de chômage peut bien être bas ! »

« Remplacer François Legault »

À la tête du PLQ depuis deux ans, Dominique Anglade a bien tenté d’opérer un virage plus à gauche, plus nationaliste. Mais ses intentions ne lui ont pas permis d’élargir sa base d’électeurs et lui ont même fait perdre des appuis chez les anglophones. Résultats : des châteaux forts libéraux sont en péril dans l’île de Montréal et à Laval.

La cheffe de 48 ans est même menacée chez elle dans Saint-Henri–Sainte-Anne, selon les plus récentes projections du site Qc125. Qu’à cela ne tienne, elle affirme n’avoir qu’un seul objectif le 3 octobre : « remplacer François Legault ». Dominique Anglade admet que « c’est un énorme défi », mais que « c’est faisable ».

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Dominique Anglade

Les promesses du PLQ

Santé

  • Garantir l’accès à un médecin de famille à tous les Québécois qui le souhaitent
  • Instaurer un programme de couverture publique universelle de la psychothérapie (jusqu’à 15 séances gratuites)
  • Éliminer les heures supplémentaires obligatoires

Éducation

  • Doubler l’allocation par enfant pour l’achat des fournitures scolaires pour atteindre 215 $
  • Rendre gratuits les projets pédagogiques particuliers dans les écoles
  • Investir 4 milliards de plus dans les infrastructures scolaires

Coût de la vie

  • Baisse d’impôt atteignant jusqu’à 1125 $ pour ceux qui gagnent 92 000 $ et moins, au coût de 2 milliards de dollars
  • Éliminer la « taxe de bienvenue » pour l’achat d’une première maison
  • Verser une allocation allant jusqu’à 2000 $ par année aux personnes de 70 ans et plus

Environnement

  • Lancer le projet ÉCO visant à nationaliser l’hydrogène vert et à augmenter la production d’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique. Il y aurait des investissements publics et privés estimés à 100 milliards d’ici 2050.
  • Atteindre la carboneutralité d’ici 2050
  • Rendre les transports en commun gratuits pour les étudiants et les aînés

Identité

  • Créer un fonds consacré à la culture et aux médias en imposant une taxe temporaire de 3 % sur le chiffre d’affaires des GAFAM, les géants du web
  • Demander au gouvernement fédéral d’adopter une loi pour encadrer son pouvoir de dépenser dans les champs de compétence des provinces
  • Ne jamais recourir de façon préventive à la clause de dérogation aux chartes des droits et libertés
Relisez notre entrevue avec Gabriel Nadeau-Dubois Relisez notre entrevue avec Paul St-Pierre Plamondon
En savoir plus
  • 300 004 $
    Dons recueillis jusqu’ici en 2022. Le PLQ est au dernier rang parmi les cinq principaux partis.
    Source : Directeur général des élections du Québec
    2208
    Nombre de donateurs jusqu’ici en 2022. Le PLQ est au dernier rang parmi les cinq principaux partis.
    Source : Directeur général des élections du Québec
  • 20 000
    Nombre de membres au Parti libéral du Québec
    Source : Parti libéral du Québec