(Ottawa) Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, fait peu de cas des virulentes critiques du premier ministre François Legault à l’endroit de son parti. À trois reprises durant la campagne, M. Legault a soutenu que le NPD et le Parti libéral sont « dangereux » pour le Québec à cause de leur volonté de s’immiscer dans les champs de compétence des provinces comme la santé.

« Mon but n’est pas de plaire à M. Legault. Mon but, c’est d’aider les Québécois et les Québécoises. Quand j’ai parlé avec les familles qui ont perdu leurs proches dans un centre de soins de longue durée, elles ne veulent pas avoir des chicanes de juridictions », a affirmé M. Singh durant une rencontre éditoriale avec La Presse.

« Les familles veulent s’assurer que l’on arrête ce qui s’est passé dans ces centres. Des évènements horribles se sont passés dans ces centres, particulièrement ceux à but lucratif. Je veux sauver des vies. Je veux mettre fin à un système privé qui est clairement le pire système pour les soins de nos aînés », a ajouté le chef néo-démocrate.

Je respecte les compétences des provinces. Mais je ne peux pas rester les bras croisés quand des gens souffrent. Cela ne fait pas partie de mes valeurs.

Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique

Dans son programme électoral, le NPD propose de nationaliser les centres de soins de longue durée privés et d’imposer des normes pancanadiennes de soins afin de s’assurer que les meilleures pratiques soient instaurées aux quatre coins du pays. Le NPD propose aussi d’augmenter les salaires des préposés et d’interdire l’ouverture de nouvelles résidences à but lucratif.

À l’instar du NPD, le Parti libéral promet d’améliorer les conditions dans les centres de soins de longue durée en offrant 6 milliards de dollars et d’imposer des normes nationales.

François Legault a dénoncé vertement les engagements de ces deux partis, tout comme ceux du Parti vert, qui, selon lui, « menacent l’autonomie de la nation québécoise » en voulant « se mêler de la gestion de la santé » et en refusant « de céder plus de pouvoirs au Québec en immigration », entre autres choses.

M. Singh tend tout de même une perche au Québec dans l’épineux dossier des transferts en santé. Il promet d’augmenter ces transferts de 68 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années afin de créer un programme national d’assurance médicaments, entre autres. Mais comme il existe déjà un tel programme au Québec, la province jouirait d’un droit de retrait avec pleine compensation.

« Il n’y aurait pas de conditions imposées au Québec pour ces transferts », a assuré M. Singh à La Presse.

Les électeurs du NPD fidèles

À quelques jours du vote, le chef du NPD se dit convaincu que l’appel que vient de lancer Justin Trudeau aux forces progressistes pour qu’elles se rallient au Parti libéral afin d’empêcher le Parti conservateur de remporter la victoire le 20 septembre sera ignoré cette fois-ci.

Selon lui, les électeurs qui appuient le NPD lui resteront fidèles parce qu’ils ne croient plus le chef libéral quand il leur promet des mesures musclées pour lutter contre les changements climatiques, ou de s’assurer que toutes les communautés autochtones aient accès à de l’eau potable, par exemple. Certes, la stratégie a fonctionné aux élections de 2015 et de 2019. Mais elle ne sera pas couronnée de succès durant la présente campagne.

« M. Trudeau a déjà commencé à faire cet appel. Mais c’est comme une émission qu’on a vue à plusieurs reprises. On connaît le scénario », dit M. Singh.

La différence, cette fois-ci, c’est que les gens qui ont déjà cru à ses promesses ne le croient plus aujourd’hui parce qu’il ne les a pas respectées. Ces gens lui ont déjà donné deux chances et ils ne lui font plus confiance.

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh, à propos de l’appel de ralliement lancé aux progressistes

En entrevue, M. Singh a défendu le cadre financier de son parti, qui prévoit 214 milliards de dollars en nouvelles dépenses et des revenus supplémentaires de 166 milliards sur cinq ans.

Le NPD croit être en mesure d’obtenir ces nouveaux revenus grâce à un impôt sur la richesse pour les contribuables qui ont une fortune de plus de 10 millions de dollars (60 milliards en revenus), en augmentant le taux d’inclusion du gain en capital à 75 % (44 milliards) et en majorant le taux d’imposition des sociétés de 15 % à 18 % (25 milliards), entre autres mesures.

« C’est une question d’égalité et de justice fiscale. Je sais que ce ne sera pas facile, mais c’est nécessaire et c’est aussi viable. […] On ne peut pas se permettre quatre autres années de M. Trudeau qui lèche les bottes des ultra-riches et des grandes entreprises », a fait valoir M. Singh.