Le chef conservateur Erin O’Toole est devenu le premier des leaders fédéraux à dévoiler ses cartes, lundi, au deuxième jour de la campagne fédérale. Dans sa plateforme électorale, qui mise surtout sur l’emploi et la croissance économique, le parti s’est toutefois positionné contre une promesse phare du gouvernement Trudeau.

Un gouvernement O’Toole annulerait en effet toutes les ententes qu’Ottawa a conclues ces dernières semaines avec les provinces pour un programme national de garderies à 10 $ d’ici cinq ans. Objectif : les remplacer par un crédit d’impôt remboursable. Une position que Justin Trudeau juge « typique » des conservateurs. Le Québec, qui fait figure d’exemple, en est déjà à 8,50 $ par jour pour une place en garderie.

Les conservateurs promettent de « convertir la Déduction pour frais de garde d’enfants en un crédit d’impôt remboursable couvrant jusqu’à 75 % des coûts pour les familles à faible revenu ». Remboursable, ce crédit d’impôt oscillerait entre 4500 $ et 6000 $.

Ainsi, le parti compte « permettre à un plus grand nombre de femmes de participer à la population active ». « Notre approche flexible et exhaustive aidera toutes les familles immédiatement, et offrira un soutien additionnel à celles qui en ont le plus besoin », note-t-il à cet effet.

Depuis Longueuil, lundi matin, Justin Trudeau n’a pas tardé à réagir à la proposition de ses rivaux. « Le naturel revient au galop. C’est l’approche de Stephen Harper, et des conservateurs, de couper dans les programmes, de ne pas être là pour les femmes, pour les familles. […] C’est typique, mais c’est surprenant, même pour moi qui les connais bien. Plusieurs gouvernements conservateurs provinciaux, comme à l’Île-du-Prince-Édouard, le Manitoba, la Saskatchewan, ont compris l’importance d’investir dans les garderies. »

Des promesses touchant le Québec

Après avoir promis de ne pas contester la loi 21 sur la laïcité de l’État dans la dernière année, les conservateurs s’engagent aussi à ne financer aucun groupe qui contesterait cette même loi à la grandeur du Québec, et ce, afin de « respecter les compétences de l’Assemblée nationale ».

Sur le plan environnemental, M. O’Toole a aussi dévoilé quelques promesses touchant la production d’aluminium au Québec, dont l’adoption d’une politique d’achat faible en carbone. Un gouvernement qu’il formerait augmenterait aussi les exportations « de nos ressources et produits les plus propres », dont l’aluminium, « pour remplacer les produits dont la fabrication est polluante ».

Garantir que le Québec ne sera « jamais sous-représenté à la Chambre des communes » lors de la création de nouvelles circonscriptions, donner « une plus grande autonomie » à Québec en matière d’immigration ou encore négocier avec le gouvernement Legault pour une déclaration de revenus unique font aussi partie des priorités conservatrices dans la province.

Dans le document de type magazine, rempli de photographies de familles, de professionnels de la santé et d’un Erin O’Toole en t-shirt, le chef conservateur accuse les libéraux, le NPD, le Bloc et les verts de n’avoir « aucun plan pour la reprise du Canada après la pandémie ». « Cette élection porte sur la personne qui, selon vous, pourra nous sortir de la récession », a-t-il insisté en point de presse lundi.

IMAGE TIRÉE DU SITE DU PARTI CONSERVATEUR DU CANADA

Page couverture de la plateforme électorale conservatrice

Se concentrant « sur la création d’emplois, l’augmentation des salaires et le rétablissement de l’économie canadienne le plus vite possible », les conservateurs promettent entre autres de « récupérer » d’ici un an 1 million d’emplois perdus pendant la pandémie.

On compte aussi créer un « prêt pour la relance des PME » qui irait jusqu’à 200 000 $, soit « quatre mois des revenus prépandémie », puis accorder aux personnes gagnant 20 000 $ par année une augmentation de salaire de 1 $/heure. Le parti promet aussi d’assumer la moitié du salaire des employés nouvellement embauchés, le tout « pendant six mois après la fin de la Subvention salariale d’urgence ».

Programmes incitatifs et santé

Afin de soutenir l’hôtellerie et le tourisme – deux secteurs durement frappés par la crise –, les conservateurs veulent aussi créer un programme incitatif qui offrirait un « un rabais de 50 % sur les aliments et les boissons non alcoolisées achetés en restaurant du lundi au mercredi pendant un mois quand ce sera sécuritaire ». Le projet représenterait 1 milliard au total, selon des chiffres préliminaires.

M. O’Toole promet également d’augmenter le financement des soins en santé mentale pour les provinces, de relancer l’industrie pharmaceutique au Canada et de resserrer les lois anticorruption, une façon de noircir par la bande le gouvernement libéral. Par ailleurs, la pandémie ayant « mis au jour les lacunes de notre système de santé », le parti entend aussi augmenter de nouveau les transferts fédéraux en santé aux provinces de 6 % par année, comme sous l’ère Harper.

Toutes ces promesses électorales reprennent essentiellement les mesures du « plan de relance » des conservateurs dévoilé au congrès national en mars. La plateforme ne sera toutefois pas chiffrée avant que le directeur parlementaire du budget ne fournisse son estimation, dans les semaines à venir. Ultimement, un gouvernement conservateur équilibrerait le budget fédéral d’ici 2031.