Le prochain gouvernement fédéral financera-t-il la construction d’un stade de baseball au bassin Peel à Montréal ? Ou donnera-t-il le terrain appartenant au fédéral qui est convoité par le groupe de Stephen Bronfman ? S’il est élu pour former le gouvernement lundi, le Parti conservateur du Canada ne ferme pas la porte à ces deux possibilités.

« Nous reconnaissons que c’est un enjeu important pour plusieurs Montréalais et Québécois. Nous allons prendre en considération les points de vue de chaque groupe et analyser les différentes propositions avant de nous prononcer », a indiqué par écrit le Parti conservateur du Canada.

Cette position diffère de celle du gouvernement conservateur de Stephen Harper, qui avait toujours refusé de financer à même les fonds d’infrastructures les projets d’amphithéâtre ou de stade de sport professionnel. En vertu de cette politique, Ottawa n’avait pas participé au financement de l’amphithéâtre de Québec, inauguré en 2015, qui avait coûté 400 millions.

Depuis quatre ans, le gouvernement libéral de Justin Trudeau a maintenu la même politique de ne pas financer directement les insfrastructures de sport professionnel. S’ils sont réélus lundi, les libéraux continueront dans cette veine et ne financeront pas de projets de sport professionnel, y compris celui d’un stade de baseball au bassin Peel. « La réponse est non. Le premier ministre [Justin Trudeau] a été assez clair. Il n’y aura pas de subvention dans ce cas-ci », dit le candidat libéral David Lametti.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le candidat libéral David Lametti, ministre fédéral de la Justice

M. Bronfman est président du financement du Parti libéral du Canada depuis les élections fédérales de 2015. Dans ce poste bénévole, M. Bronfman « ne participe pas à la prise de décisions politiques », précise le Parti libéral du Canada.

Donner ou vendre le terrain ?

Ottawa aura une deuxième décision à prendre dans le dossier du stade de baseball : si le projet fonctionne, donnera-t-il ou vendra-t-il à sa juste valeur marchande le terrain convoité par le groupe de Stephen Bronfman ?

Pour construire son stade de baseball, le groupe de M. Bronfman convoite un terrain d’environ 700 000 pieds carrés appartenant à la Société immobilière du Canada (SIC), une société d’État fédérale. L’évaluation municipale du terrain est de 6 millions de dollars. Mais avec un changement de zonage qui permettrait de construire jusqu’à 4 millions de pieds carrés de bâtiments, le terrain vaudrait 140 millions, selon le promoteur immobilier Devimco, qui est associé avec le groupe de M. Bronfman pour construire autour d’un futur stade.

La SIC a-t-elle l’intention de donner son terrain ou de le vendre à sa juste valeur marchande (environ 140 millions) ? Sans faire de commentaire sur le terrain du bassin Peel, la SIC rappelle que « [ses] transactions se font de façon générale selon la valeur marchande d’un terrain ».

Habituellement, quand [elle vend] un terrain à un promoteur privé, [elle] le fait à sa valeur marchande. [Ses] transactions doivent être économiquement viables.

Marcelo Gomez-Wiuckstern, vice-président des communications de la SIC

L’organisme fédéral précise être « une société d’État indépendante et autofinancée ».

« Le gouvernement ne participe pas aux activités quotidiennes [de la SIC] », indique l’organisme, qui possède le terrain du bassin Peel depuis que le gouvernement fédéral le lui a cédé (à la valeur marchande) en 2010.

Les libéraux de Justin Trudeau ont indiqué leur intention de laisser la SIC décider de l’avenir du terrain convoité par le groupe de M. Bronfman. « La décision appartient à la SIC, ils ont leurs critères, ils doivent décider [avec] le plan d’aménagement de la Ville de Montréal. [La SIC] prend des décisions indépendantes [du gouvernement] […] Ce n’est pas à nous de décider. Nous laissons la décision à la SIC. S’ils ne suivent pas leurs propres critères, c’est une autre affaire », dit le candidat libéral David Lametti, ministre fédéral de la Justice.

De son côté, le Parti conservateur du Canada veut « prendre en considération les points de vue de chaque groupe et analyser les différentes propositions avant de [se] prononcer » sur le dossier du terrain fédéral.

L’homme d’affaires montréalais Stephen Bronfman est à la tête du groupe de gens d’affaires voulant ramener une équipe du baseball majeur à Montréal. Advenant le retour d’une équipe du baseball majeur, le groupe veut construire un stade de baseball au bassin Peel. Le groupe de M. Bronfman n’a pas encore précisé quel type d’aide gouvernementale il pourrait demander.

Détail important dans ce dossier : la Ville de Montréal détient un droit de premier refus sur toute transaction concernant le terrain fédéral au bassin Peel. En pratique, Ottawa et Montréal doivent donc être d’accord sur l’utilisation du terrain pour qu’une transaction ait lieu. Montréal fait actuellement une consultation sur l’avenir de ce quartier. « Notre façon de fonctionner est de travailler avec toutes les parties prenantes, la Ville de Montréal, les voisins, les résidants, les groupes communautaires, pour comprendre leurs visions, dit Marcelo Gomez-Wiuckstern, vice-président des communications de la SIC. Nous avons une belle relation avec la Ville de Montréal et nous travaillons très bien ensemble. »

NPD, Bloc québécois et Parti vert

Chez les autres partis politiques fédéraux, le Bloc québécois et le Parti vert du Canada ne veulent pas utiliser de fonds fédéraux pour les infrastructures afin de financer la construction d’un stade de baseball à Montréal. Le NPD est « prêt à étudier » la possibilité de financer la construction du stade, même s’il a des « choses plus prioritaires en matière d’infrastructures », comme les logements abordables.

Pour le terrain fédéral, le NPD et le Parti vert du Canada estiment que le terrain en question doit être utilisé entièrement pour la construction de logements abordables, tandis que le Bloc québécois attend de voir la position de la Ville de Montréal sur l’avenir du quartier (p. ex. : le fédéral pourrait céder la partie pour des logements sociaux, mais demander la juste valeur marchande sur la partie du stade et de l’immobilier de luxe).