Qui de Justin Trudeau ou d’Andrew Scheer offre les baisses d’impôt les plus généreuses ? Les deux principaux partis fédéraux offrent chacun des baisses d’impôt importantes aux contribuables : 5,6 milliards par an pour les libéraux, contre 5,9 milliards par an pour les conservateurs. Traduction : quelques centaines de dollars par an par contribuable. Résumé des baisses d’impôt offertes jusqu’à présent dans la campagne électorale.

Les conservateurs

Ils proposent de réduire de 15 % à 13,75 % le taux du premier échelon d’impôt fédéral (revenus d’environ 12 000 $ à 47 600 $ par an) d’ici janvier 2023. Les Canadiens ne paient pas d’impôt fédéral sur leur première tranche de 12 000 $ de revenus. Le taux des crédits d’impôt baisserait aussi de 15 % à 13,75 %. Pour l’ensemble des contribuables, cette mesure coûterait à Ottawa 5,9 milliards à terme en 2023-2024. 

Les libéraux

Ils proposent de hausser le montant personnel de base (le montant sur lequel on ne paie pas d’impôt fédéral) d’environ 1908 $ par an en 2023, pour qu’il atteigne 15 000 $ par an. Cette mesure vaudrait pour tous les contribuables gagnant moins de 147 000 $ par an. Pour l’ensemble des contribuables, cette mesure coûterait à Ottawa 5,6 milliards à terme en 2023-2024. 

Trois scénarios

En pratique, à quelles baisses d’impôt auriez-vous droit ? À la demande de La Presse, la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke a fait les calculs pour trois types de contribuables. Par exemple, pour un couple où les deux personnes gagnent 90 000 $ par an chacune, l’économie d’impôt est de 633 $ par an avec les conservateurs et de 478 $ par an avec les libéraux.

Transports en commun et activités des enfants pour les conservateurs

L’écart entre les deux partis se creuse si les contribuables prennent les transports en commun ou si leurs enfants s’inscrivent à des activités sportives ou artistiques. Les conservateurs promettent de rétablir deux crédits d’impôt du gouvernement Harper sur les laissez-passer de transports en commun et les activités sportives ou artistiques des enfants. Les crédits d’impôt seront de 13,73 %. Pour une personne qui paie 1500 $ par an pour prendre les transports en commun, ça équivaut à une baisse d’impôt supplémentaire de 172 $ par an. Pour des cours sportifs d’un maximum de 1000 $ par enfant, ça équivaut à 138 $ par enfant. Pour des cours artistiques d’un maximum de 500 $ par enfant, ça équivaut à 69 $ par enfant. Coût total pour Ottawa de ces trois crédits d’impôt à terme en 2023-2024 : 532 millions.

Allocation canadienne pour enfants bonifiée par les libéraux

Les libéraux, eux, ont choisi de bonifier jusqu’à 1000 $ par an l’Allocation canadienne pour enfants pour un enfant de moins de 1 an. Il s’agit d’une allocation familiale qui n’est pas imposée. Actuellement, Ottawa verse une allocation jusqu’à 6639 $ par an par enfant admissible de moins de 6 ans (ainsi que 5602 $ par an par enfant admissible entre 6 et 17 ans). Dans nos scénarios, les deux couples auraient droit à environ 1000 $ de plus s’ils ont un enfant de moins de 1 an. Les libéraux n’ont pas chiffré le coût total précis de cette hausse de l’Allocation canadienne pour enfants.

Pas d’impôt pendant les congés parentaux

Les libéraux et les conservateurs ont chacun promis d’offrir un congé d’impôt fédéral durant les congés parentaux. Si l’un des deux parents prend un congé parental d’un an, il ne paiera donc pas d’impôt fédéral sur ses prestations de congé parental durant cette période. Il y a quelques différences entre la proposition des libéraux et celle des conservateurs, mais en gros, cette mesure devrait coûter environ 1 milliard de dollars à Ottawa en 2023-2024 (du moins pour la proposition des conservateurs).

Le compte final

En comptant tout, tout, tout (les baisses d’impôt, les crédits d’impôt, les congés d’impôt sur les congés parentaux et la hausse de l’Allocation canadienne pour enfants), on arrive au bout du compte à des baisses du fardeau fiscal qui coûteront à terme au gouvernement fédéral : 

• 6,8 milliards par an pour les propositions des libéraux* ;

• 7,4 milliards par an pour les propositions des conservateurs.

En guise de comparaison, le déficit prévu du gouvernement fédéral en 2019-2020 est de 19,8 milliards. En 2023-2024, Ottawa prévoit récolter des revenus totaux de 395,5 milliards. Les baisses d’impôt des conservateurs représentent environ 1,9 % des revenus projetés, comparativement à 1,7 % des revenus projetés pour les libéraux.

Comment financer tout ça ?

Détail important : les deux partis politiques n’ont pas encore dévoilé comment ils paieraient pour ces baisses d’impôt sans hausser le déficit déjà prévu. Ils doivent dévoiler l’ensemble de leur cadre financier d’ici la fin de la campagne électorale. « Un petit 100 $ donné à tout le monde se transforme rapidement en milliards sur les finances publiques. C’est un peu paradoxal de promettre des réductions d’impôt alors qu’on est en déficit. Normalement, on promet des réductions fiscales une fois l’équilibre budgétaire atteint. Pour le moment, on n’a pas le cadre financier des partis pour voir comment tout ça se finance », souligne Luc Godbout, professeur et chercheur principal à la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke.

*Ce montant comprend une série de mesures annoncées par les libéraux pour aider les familles, dont principalement le congé d’impôt pour les congés parentaux et la hausse de l’Allocation canadienne pour enfants