Au moment où il a été atteint de deux balles au thorax, Fredy Villanueva se trouvait au-dessus du policier, qu'il «retenait ou poussait» au sol du bras gauche et «s'apprêtait à frapper avec son bras droit». Telle est l'hypothèse de la pathologiste judiciaire qui a pratiqué l'autopsie de Fredy Villanueva.

«Le bras gauche au sol retient alors que le bras droit veut frapper : cela m'apparaît le scénario le plus probable», a dit hier la Dre Anny Sauvageau appelée à témoigner à l'enquête du coroner André Perreault sur la mort de Fredy Villanueva, le 9 août 2008, à l'âge de 18 ans. Le rapport médico-légal d'Anny Sauvageau, rendu public hier, indique que le jeune homme a été atteint par trois tirs. Deux balles ont pénétré dans le thorax et traversé le diaphragme. Plusieurs organes ont été touchés, dont la veine cave inférieure, une lésion mortelle. La troisième balle n'a causé qu'une blessure superficielle au poignet.

L'étude de la trajectoire des deux tirs au thorax démontre, selon l'analyse de la pathologiste judiciaire, que M. Villanueva était incliné vers l'avant, le bras gauche et l'épaule gauche plus bas que le reste du corps, la hanche droite et l'épaule droite vers le haut, les deux épaules alignées. «J'avais beau essayer de me placer dans l'environnement, la seule chose que je pouvais recréer, c'est cette position», a dit l'experte.

Contre-interrogatoire

Il a beaucoup été question, hier, de ce qui aurait pu expliquer la posture de M. Villanueva par rapport à l'agent Lapointe, alors au sol. «Est-ce que c'est possible que ce soit une personne qui se retourne ?» a demandé Me Peter Georges-Louis, avocat de la famille Villanueva. «Non», a répondu Anny Sauvageau.

Le scénario retenu par la légiste a fait l'objet de nombreuses questions hier en contre-interrogatoire. «Il faut faire la différence entre les faits, les hypothèses les plus probables, les peu probables et les impossibles», a ainsi dit Mme Sauvageau en réponse à Alexandre Popovic, représentant de la Coalition contre la répression et les abus policiers.

«Si je suis dans le Vieux-Montréal, que j'entends des sabots et un animal qui hennit, on va me demander si c'est un cheval et je vais dire que c'est le plus probable. Ça peut être un zèbre, mais je dis que c'est peu probable. Si on me dit une poule, je dis que c'est impossible», a-t-elle poursuivi.

La révélation par Me René St-Léger, avocat de l'un des deux jeunes hommes également blessés le 9 août 2008, que Fredy Villanueva était un «franc gaucher» n'a pas troublé outre mesure l'analyse d'Anny Sauvageau. «J'avais cru qu'il était droitier. Il se peut que l'action principale soit ce que le bras gauche fait», a-t-elle suggéré.

Dans son contre-interrogatoire, Me Alain Arseneault, avocat de Jeffrey Sagor-Metellus, a également tenté de savoir s'il était possible que Fredy Villanueva ait été blessé au moment où il lâchait l'agent Lapointe, alors allongé au sol avec son frère Dany. «Ce n'est pas une position typique pour se redresser», a-t-elle alors répété.

Enfin, Me Arseneault a demandé que soient ajoutées au dossier plusieurs pièces, parmi lesquelles des photographies de l'autopsie. L'enquête se poursuit aujourd'hui au palais de justice de Montréal avec la reprise du témoignage d'Anthony Clavasquin, autre témoin du drame.