Michel Desjoyeaux et Roland Jourdain ont tourné au cap Horn. La phase finale de l'édition 2008/2009 du Vendée Globe débute après 57 jours en mer. L'enjeu est grand, voire empreint d'une symbolique personnelle pour tous les prétendants.
Avec 7 000 milles à faire d'ici l'arrivée, ils ne sont plus que cinq sur les 14 encore en course à pouvoir prétendre à la victoire. Michel Desjoyeaux (Foncia) a mis le clignotant à gauche ce matin, ce qui marque le commencement de sa longue remontée de l'Atlantique avec 110 milles d'avance sur son copain Roland Jourdain (Veolia). Avec 481 milles de retard sur Desjoyeaux, Jean Le Cam (VM Matériaux) passera le cap légendaire demain suivi dans la journée par Vincent Riou (PRB) et Armel Le Cléac'h (Brit Air).
Ainsi s'amorce la phase de régate pure en direction de la ligne d'arrivée. Quatre de ces cinq prétendants en sont à leur deuxième Vendée Globe alors qu'un seul (Le Cléac'h) en est à son baptême de circumnavigation en solitaire. Deux marins de ce groupe sélect sont d'anciens gagnants de l'épreuve : Michel Desjoyeaux et Vincent Riou ont remporté les honneurs lors des éditions de 2000 et 2004 respectivement. Un concurrent en est à sa troisième participation : Roland Jourdain, bon troisième en 2000 alors qu'il fut forcé à l'abandon en 2004.
Si la possibilité de voir Riou et Le Cléac'h remporter l'épreuve est minime, Desjoyeaux, Jourdain et Le Cam débutent une guerre sans pitié où personne ne se fera de cadeau. Il faut reconnaître que l'enjeu est grand pour les trois amigos des mers. Desjoyeaux cherche à devenir le premier double vainqueur de l'épreuve alors que Le Cam rêve de faire oublier sa deuxième position de 2004 alors qu'il avait terminé avec sept heures heure de retard seulement sur Vincent Riou.
Il faut se rappeler qu'à l'époque, Le Cam avait tourné le cap Horn avec 300 milles d'avance et qu'il n'a jamais digéré complètement sa deuxième position. Dans le cas de Roland Jourdain, c'est la première fois qu'il parvient à contourner le Horn avec un bateau en santé. En 2000, il n'avait pas eu d'autre choix que de stopper la machine dans une baie immédiate au virage du célèbre cap pour effectuer une réparation à son rail de grand-voile et avait anéanti par le fait même toutes ses chances de victoire.
Lorsque joint ce matin par vidéoconférence (une première pour le Vendée Globe), Michel Desjoyeaux soulignait son soulagement d'en finir avec le Pacifique :
« C'est bien que les mers sud finissent. J'ai fait l'inspection de mon bateau ce matin et commencé à bricoler sur les choses à réparer. Rien de majeur de brisé, mais à réparer tout de même. J'ai trouvé difficile de ne jamais avoir de moments de répit cette année. Je n'ai jamais un moment de repos contrairement à voilà huit ans et passer le Horn a des effets très relaxants. Pour ce matin, je pense pouvoir passer par le détroit de Le Maire (le passage maritime à la pointe est de la Terre de Feu), mais je suis dans le petit vent et je ne suis pas encore certain de mon option. »
De son coté, l'apaisement de quitter les mers du sud était palpable au timbre de voix de Bilou :
« Je vois le cap Horn. Il y a une cellule orageuse, mais je suis content de voir les cailloux et la pointe. En même temps, depuis hier, je me dis que je ne reviendrai pas là-bas de si tôt. Que ça fait plaisir pour le bateau! La vie est belle, je suis deuxième à 100 milles du premier. J'ai quelques bobos sur les mains et je travaille avec des gants pour éviter d'aggraver la situation. J'ai hâte de me dégourdir et de faire des manoeuvres dehors. Le temps est gris, mais ce matin j'ai eu un instant de grâce : le soleil a percé, tout s'est ouvert et c'était merveilleux; les couleurs, les verts, l'écume sur les falaises, les oiseaux... La météo des prochaines heures va être compliquée. Il y a un choix à faire entre prendre ou pas le vent. Pour l'instant , j'ai de l'avance, mais le vent peut faire des changements. Donc hors de question de dire si je passe ou non par le détroit de Le Maire. »
La meilleure des deuxièmes en ce moment est Samantha Davies (Roxy), suivie de Marc Guillemot (Safran). Respectivement positionnés à plus de 2100 et 2375 milles nautiques derrière Desjoyeaux, les deux skippers ont vu ce matin le Jury international leur octroyer les heures à retrancher sur le parcours en rapport avec leur détournement autorisé par la direction de course pour venir en aide à Yann Éliés qui, on s'en souviendra, s'était cassé le fémur plus tôt dans l'épreuve.Dans le cas de Davies, le jury lui octroie 32 heures à retrancher sur son parcours total alors que dans le cas de Guillemot, il s'agit de 82 heures. Si les deux skippers passaient la ligne d'arrivée aujourd'hui, Guillemot gagnerait une position alors que Davies en perdrait une.
Le jeu stratégique est maintenant ouvert pour les amis à l'avant. Si l'Indien et le Pacifique ont limité les options en matière de routage étant donné le positionnement des portes de sécurité virtuelles à franchir, l'Atlantique quant à lui offre une pleine main à jouer. Et croyez-moi ça jouera dur.
Les positions à 15h TU + retard sur le 1er (milles nautiques)
Suivez la position des skippers
1- Michel Desjoyeaux-FRA (Foncia),
2- Roland Jourdain-FRA (Veolia Environnement), 112
3- Jean Le Cam-FRA (VM Matériaux), 481
4- Vincent Riou-FRA (PRB), 694
5- Armel Le Cléac'h-FRA (Brit Air), 704
6- Samantha Davies-GB (Roxy), 2105 (32 heures seront à retrancher de son parcours)
7- Marc Guillemot-FRA (Safran), 2404 (82 heures seront à retrancher de son parcours)
8- Brian Thompson-GB (Team Pindar), 2759
9- Dee Caffari-GB (Aviva), 2966
10- Arnaud Boissières-FR (Akena Verandas), 3026
11- Steve White-GB (Toe in Water), 3710
12- Rich Wilson-USA (Great American), 4846
13- Norbert Sedlacek-AUT (Nauticsport), 5867
14- Raphaël Dinelli-FRA (Océan Vital), 6014
15- Jonny Malbon-GB (Artemis), Abandon, Problème de grand-voile
16- Jean-Pierre Dick-FRA (Paprec-Virbac), idem, safran bâbord arraché
17- Sébastien Josse -FRA (BT), idem, Safran cassé
18- Derek Hatfield-CAN (Spirit of Canada), Idem, Barres de flèche cassées
19- Yann Eliès-FRA (Generali), Idem, Fracture à la jambe
20-Jean-Baptiste Dejeantly-FRA (Maisonneuve), idem, multiples problèmes d'usure
21- Mike Golding-GB (Ecover), idem, Dématâge
22- Bernard Stamm-SUI (Cheminée Poujoulat), idem, Échouage
23- Dominique Wavre-SUI (Temenos), idem Ennuis de quille
24- Loïc Peyron-FRA (Gitana Eighty), idem, Démâtage
25- Una Basurko-ESP (Pakea Bizkaia), idem, Bris au puits de safran tribord
26- Jérémie Beyou-FRA (Delta Dore), idem, Barres de flèches cassées
27- Alex Thompson-GB (Hugo Boss), idem, Dommages structurels
28- Kito de Pavent-FRA (Groupe Bel), idem, Démâtage
29- Marc Thiercelin-FRA (DCNS), idem, Démâtage
30- Yannick Bestaven-FRA (Aquarelle.com), idem, Démâtage