Il souhaitait passionnément devenir chef du Parti libéral et premier ministre du Canada.

Hier, dans une conférence de presse où l'émotion l'étreignait, Bob Rae a tiré un trait sur ses grandes ambitions, pour le bien de son parti, a-t-il expliqué.

«Laissons cette passion travailler pour le Parti libéral et laissons cette passion travailler pour le Canada que nous aimons tant», a-t-il lancé en tentant de son mieux d'apaiser ceux qui ont vu dans son geste une capitulation antidémocratique.

M. Rae, dans un geste magnanime, a expliqué pourquoi il avait changé d'idée, lui qui, 24 heures plus tôt, se battait corps et âme contre un «couronnement» venu «d'en haut» de Michael Ignatieff qui faisait fi de toute consultation auprès des membres de la base du parti.

«L'exécutif du parti a rendu sa décision et je dois l'accepter sans rancoeur et sans déception», a-t-il d'abord affirmé. Tard dans la nuit de lundi à mardi, l'exécutif du parti avait décidé, en raison de l'urgence de la situation, d'abandonner le long processus d'une course à la direction pour confier à l'aile parlementaire du parti, à l'exécutif national et à quelques autres responsables le choix du successeur de Stéphane Dion.

Bob Rae savait que sa seule chance de battre son ami Ignatieff - et favori du caucus - était une longue guerre de tranchées qui aurait culminé au congrès du mois de mai à Vancouver. Ce scénario rendu caduc par la décision de l'exécutif, il a vite compris qu'il n'avait rien à gagner à persister à faire une course perdue d'avance.

«Le Parti libéral du Canada a eu l'expérience de trop de divisions dans le passé, a fait valoir le député de Toronto Centre. Et je n'ai aucune intention de faire quelque chose qui pourrait nuire au Parti libéral du Canada.»

Plus Bob Rae parlait et répondait aux questions des journalistes hier, plus il gagnait en assurance et plus il semblait à l'aise avec sa décision.

«Je pense que nous devons accepter que le déroulement des événements ces derniers temps fut particulièrement hors de l'ordinaire et nos ambitions sont moins importantes que l'intérêt supérieur du Parti libéral et l'intérêt supérieur du pays», a-t-il encore affirmé.

M. Rae a souhaité que tous les libéraux comprennent ce qui se passe: «Ce sont des moments inusités, a-t-il dit. Personne ne s'attendait à un énoncé économique fondamentalement stupide» (de la part du gouvernement Harper).

L'ancien premier ministre de l'Ontario a alors offert à Michael Ignatieff son appui total et inconditionnel. «Il est mon ami et mon collègue depuis plus de 40 ans, a-t-il ajouté. Je demande à mes amis et à ceux qui m'appuient de faire exactement ce que je fais aujourd'hui. Je connais Michael Ignatieff. Il est plein de sagesse et de générosité. Il fera un grand premier ministre.»

Michael Ignatieff, qui a maintenant la voie libre pour prendre la direction du PLC, n'a pas réagi de vive voix au geste posé par son ami. Il a cependant exprimé dans un communiqué toute sa gratitude envers Bob Rae. «Sa décision aujourd'hui, a-t-il écrit, reflète son engagement envers l'unité du Parti libéral et le besoin urgent d'affronter les défis auxquels notre pays fait face.»