L'année judiciaire 2010 a été fertile en événements de toutes sortes. Voici quelques-unes des causes qui ont marqué l'année au Québec.

Déjà vu: Norbourg

Après quatre longs mois, le procès des coaccusés de Vincent Lacroix dans l'affaire Norbourg avorte le 26 janvier 2010 sur un désaccord du jury. Les jurés trouvent la preuve trop complexe et sont persuadés qu'ils ne parviendront jamais à s'entendre pour trancher sur les 705 accusations auxquelles font face les cinq accusés. Le juge Richard Wagner est contraint de dissoudre le jury. Le procès repart à zéro en septembre, devant un autre juge (Marc David) et un nouveau jury. Pour simplifier la preuve, la Couronne abandonne les accusations de recyclage des produits de la criminalité pour ne conserver que celles de fraude et de fabrication de faux. Cela donnera tout de même un total de 615 verdicts à rendre. Le procès, qui chemine depuis trois mois maintenant, fait relâche pour les Fêtes et reprendra en janvier. Rémi Deschambault, Jean Cholette, Félicien Souka, Serge Beugré et Jean Renaud sont accusés d'avoir aidé Vincent Lacroix à détourner environ 100 millions de dollars que des petits épargnants avaient investis dans Norbourg.

Explosion de violence: attaque en Cour d'appel

Sylvain Gaudreau, 47 ans, est en guerre juridique depuis huit ans avec ses propriétaires, qui ont finalement réussi à l'évincer de leur maison de Sainte-Adèle. Gaudreau laisse derrière lui une maison complètement saccagée et insalubre ainsi qu'une montagne de vieux objets. Au terme d'une ultime audience en Cour d'appel, le 4 août 2010, Gaudreau perd sa cause et le juge lui ordonne de ramasser ses biens dans les 30 jours. Frustré, il se rue sur ses opposants. Devant le juge médusé, il frappe Robin Doak à coups de poing et enfonce un pouce dans l'oeil de Maurice Tétreault. Il n'y a pas de constable spécial dans la salle et il faut un certain temps avant que des agents arrivent et maîtrisent Gaudreau. Dans la foulée de cette spectaculaire agression, Gaudreau est accusé de voies de fait armées ayant causé des lésions. Il est actuellement emprisonné, en attente de son procès.

Attendu: Guy Lafleur acquitté

Le 17 août 2010, la Cour d'appel acquitte Guy Lafleur, accusé d'avoir rendu des témoignages contradictoires en 2007 dans le cadre des poursuites judiciaires entreprises contre son fils, Mark. Le célèbre numéro 10 du Canadien n'a pas voulu tromper la Cour quand il a dit que son fils avait respecté ses conditions de mise en liberté. Le feuilleton, qui dure depuis trois ans, est terminé, au grand soulagement du principal intéressé et des nombreuses personnes qui trouvaient qu'on avait poussé le bouchon un peu loin. Il est malgré tout trop tôt pour parler de «fin» à cette histoire, puisque M. Lafleur a intenté une poursuite en dommages de 3,5 millions contre le procureur général du Québec et le Service de police de la Ville de Montréal. La date de ce procès civil n'est pas encore fixée.

Intraitable: quadruple meurtrier condamné

Même si Daniel Poirier a tué quatre personnes entre 1990 et 1999, on ne peut pas dire qu'il est un tueur en série, du moins dans le sens où on l'entend habituellement. C'était sa manière de régler un différend, même futile, ou d'éliminer un témoin gênant. Il a pu vivre sans être inquiété pendant toutes ces années. Mais en 2008, soupçonné pour un de ces homicides, il est tombé dans un piège que lui avait tendu la police, et il a fini par confesser quatre meurtres. En mai 2010, l'homme de 50 ans a plaidé coupable à quatre accusations de meurtre non prémédité, et a écopé de la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Le juge James Brunton a conclu que les circonstances de cette affaire justifiaient d'imposer la période de détention obligatoire, la plus longue prévue par la loi.

Cauchemar éveillé: Acquitté du meurtre de soeur Lauzon

Martin Rondeau est un gentil garçon quand il est éveillé. Étonnamment, c'est quand il dort qu'il devient dangereux. L'homme de 33 ans souffre de crises d'épilepsie nocturnes, qui peuvent l'entraîner à faire des choses ahurissantes. Il faisait une de ces crises lorsqu'il a battu à mort sa bienfaitrice, soeur Estelle Lauzon, le 13 août 2007, dans la résidence de Montréal où il était hébergé par des religieuses. La victime avait plus de 80 ans. En février 2010, Rondeau est acquitté de l'accusation de meurtre en raison de son épilepsie nocturne, qui est considérée comme un trouble mental. Il obtient sa liberté, mais celle-ci sera fortement encadrée et réglementée... la nuit.

Insolite: La mystérieuse équipée du tigre Jonas et ses deux dromadaires

La remorque dans laquelle dormaient Jonas le tigre et les dromadaires Shawn et Todd est volée dans le stationnement d'un motel de Saint-Liboire, tôt le matin du 18 juin. Il fait chaud, on s'inquiète pour la santé des bêtes, qui étaient en route pour rentrer au bercail dans leur zoo ontarien, au moment de l'incident. Les heures passent, puis les jours, sans nouvelles ni demande de rançon. Le soir du 21 juin, joie et allégresse: la roulotte est retrouvée dans un petit chemin de Saint-Eugène-de-Grantham. Les trois bêtes sont en forme et ont manifestement été nourries et abreuvées. Quelques jours plus tard, trois personnes sont arrêtées: Mathieu Cyr, voleur présumé de la roulotte, ainsi que Mathieu Bussières et Stephan Lavigne, qui ont hébergé les trois hôtes dans un grand bâtiment de la ferme qu'ils louent. Bussières a plaidé coupable à une accusation de recel et est en attente de sa peine. Il compte demander la clémence, puisqu'il a pris soin des bêtes. Lavigne, qui est aussi accusé de recel, doit revenir devant le tribunal prochainement. En ce qui concerne Cyr, la date de son procès reste à fixer. Il veut être jugé par un jury.

Fuite et fin pour une collision fatale

En mai, le restaurateur Thomas Vernis, 28 ans, écope de 12 mois de prison à purger dans la collectivité pour avoir poursuivi sa route après avoir heurté à mort François Dumouchel, 36 ans. M. Dumouchel, un DJ bien connu qui travaillait sous le nom de DJ Euterke, circulait en scooter du sud au nord sur le boulevard Saint-Laurent, tandis que M. Vernis roulait dans sa Jeep en direction ouest sur la rue Villeneuve. La collision est survenue à l'angle des deux rues. Selon un témoin, la victime avait grillé le feu rouge.

Terrorisme sur le web

En février, Saïd Namouh, 37 ans, écope de la prison à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 10 ans pour avoir fait la promotion du terrorisme sur le web, pour l'Islamic Media Front. Au terme de son procès, il a également été déclaré coupable de complot pour commettre un attentat et de participation aux activités d'un groupe terroriste. La preuve a démontré que Namouh s'apprêtait à quitter le Canada pour commettre un attentat outre-mer, vraisemblablement en se faisant exploser dans une opération kamikaze. «Mon cher frère, je te charge de mon fils et donnez-moi une voiture pleine», avait-il écrit à un complice en Autriche, en août 2007. D'origine marocaine, Namouh était arrivé au Québec en 2003, après avoir épousé une Québécoise beaucoup plus âgée que lui. L'union n'a pas duré. Au terme de sa peine, l'homme devrait être expulsé du Canada.

Un juge dans le box des accusés

En juin, stupeur et consternation à Québec. Un juge de la Cour d'appel à la retraite, Jacques Delisle, âgé de 75 ans, est arrêté et accusé du meurtre de sa femme, Marie-Nicole Rainville. La femme de 71 ans a été trouvée morte le 12 novembre 2009, dans l'appartement qu'elle occupait avec son mari, à Québec. Victime d'un AVC en 2007, Mme Rainville était restée paralysée en partie. Ce qui apparaissait au départ comme un suicide par arme à feu s'est transformé en meurtre en cours d'enquête. Celle-ci a duré plusieurs mois. Une semaine après son arrestation, M. Delisle a facilement obtenu sa liberté sous cautionnement, en attendant la suite du processus judiciaire.

Acquitté de tentative de meurtre à 85 ans

En février, Celso Gentili, 85 ans, est acquitté d'une accusation de tentative de meurtre pour cause de trouble mental. Les experts estiment que M. Gentili était en plein délire de persécution quand il a fait feu sur l'infirmière Marlena Cardoso, le 14 juillet 2009, dans la résidence pour personnes âgées Les Jardins de l'Aubade, à Saint-Léonard. Ancien pâtissier dans les grands hôtels, M. Gentili croyait que la femme lui avait volé un moule à gâteau et jugeait qu'elle était injuste avec lui depuis quatre ans. M. Gentili s'était rendu en fauteuil motorisé jusqu'au poste des infirmières et avait fait feu sur la victime avec un vieux fusil de calibre 12 qu'il gardait depuis longtemps. Sérieusement blessée à un bras et au thorax, Mme Cardoso a heureusement survécu.