Il y a des recettes qui ne se trouvent que sur du vieux papier jauni, taché d'huile et de sauce tomate. Celles qu'on réclame à maman ou à grand-maman, qu'on recopie précieusement et qu'on transmet au reste de la famille. Des tourtières, des ragoûts, des tartes au sucre goûtant « la maison »...

Au cours des dernières semaines, vous avez été nombreux à partager avec nous une recette de famille. Après un tri difficile, nous en avons sélectionné six, principalement en raison de l'histoire derrière chacune d'elles. Nous les avons ensuite essayées et dégustées. Voici le résultat de ce voyage au coeur du patrimoine québécois.

Si tout va bien, au cours des prochaines semaines, Marie-Pier Bergevin réunira sa mère, ses tantes et une partie de ses cousins dans une même cuisine. Le projet : assurer la transmission des meilleures recettes familiales d'une génération à l'autre.

Dans les locaux de la Guilde culinaire, à Montréal, la famille préparera le ketchup et les betteraves marinées d'Hélène, le gâteau Reine-Élisabeth de Gisèle et le fudge de Madeleine.

« Ma mère et mes tantes sont vraiment contentes : c'est un honneur pour elles qu'on veuille conserver les traditions. C'est aussi l'occasion de se voir et de prendre un verre de vin tous ensemble ! »

La jeune femme de 28 ans compte rassembler une quinzaine de personnes pour l'occasion. La famille ira choisir les ingrédients au marché, selon les précieux conseils des cuisinières d'expérience.

Le chef-propriétaire de la Guilde, Jonathan Garnier, constate que même après avoir exploré des techniques de cuisine complexes, plusieurs gourmets redécouvrent les mets de leur enfance : « Je vois des gens très ouverts qui cuisinent des mets assez poussés, mais qui ne sont pas capables de faire un ragoût. Ils se demandent ce qu'il y a dans un ragoût .»

La Guilde et d'autres établissements offrent des cours de cuisine de base, mais le savoir familial n'a pas de prix, ajoute-t-il.

« Un repas fait en famille, c'est un repas que l'on va préparer et manger ensemble. La cuisine familiale, c'est un passage de valeurs, croit le chef. Derrière, il y a toute une histoire. »

Une transmission de génération en génération, mais avec des nuances. Le secret d'une recette réussie réside dans de petits détails qui se transmettent mal sur du papier.

« J'ai toujours plein de questions ! Est-ce que je mets tel ingrédient avant l'autre ? Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas toujours des quantités exactes ? Et puis, les pots Mason, ça me semble tellement compliqué ! s'exclame Marie-Pier. J'ai hâte d'apprendre. »

L'intérêt pour le patrimoine culinaire québécois est tel que le Cercle des fermières doit constamment rééditer le plus populaire de ses livres, Les recettes des fermières du Québec. « On voit vraiment que les livres de recettes plus traditionnelles correspondent vraiment à un besoin, croit Georgette Girard. On en vend tellement qu'on estime qu'une famille sur deux au Québec possède un de nos livres ! Je pense que c'est parce que ce sont des recettes réconfortantes et à la portée de tous. »