L'approche a été conviviale. Familiale. Petit souper à la maison sans flafla. «Ça s'est passé vers la fin du mois d'août, a raconté Patrick Roy, hier, lors d'un entretien téléphonique. J'ai reçu un appel de Pierre Boivin, qui a demandé à me voir. Il est venu souper chez moi à Québec, en compagnie de Bob Gainey, et on a passé une soirée extraordinaire.

«J'ai adoré notre conversation parce qu'il a beaucoup été question du côté familial du Canadien, qui correspond au genre d'approche qu'on essaie d'avoir avec les Remparts de Québec.

«Puis M. Boivin m'a demandé si j'étais prêt à voir mon chandail retiré...»

Depuis longtemps, Roy espérait que ça se produise. Mais il avait compris qu'il devait être patient.

«Je comprenais que d'autres joueurs - les Savard, Robinson, Gainey, Dryden... - devaient passer avant moi, dit-il. Ces hommes-là ont été des parts importantes de l'histoire du Canadien et c'est un honneur pour moi d'aller les rejoindre.»

Pas un divorce

Le Canadien a parfois eu la mauvaise habitude de se retrouver en froid avec quelques-unes de ses légendes. Ça s'est produit avec Maurice Richard, plus tard avec Guy Lafleur. Cette main tendue par le Tricolore vers l'ancien gardien est-elle une façon de mettre un baume sur le divorce de 1995?

«Je n'ai jamais vu cela comme un divorce, affirme Roy. Ça fait longtemps que j'ai passé par-dessus les événements du 2 décembre.

«Quand on vit un échange, on peut réagir de différentes façons. Mais pour moi, la meilleure façon de réagir était d'aider l'Avalanche à jouer le mieux possible.

«Je l'ai dit à plusieurs reprises, je n'ai rien contre l'organisation du Canadien, assure Casseau. Les gens qui sont à la tête de l'équipe en ce moment, les Bob Gainey et Guy Carbonneau, sont des gens pour qui j'ai énormément de respect.»

Il reste que le retrait de son numéro va permettre à tout le monde de tourner la page sur ce fameux soir de 1995, quand l'entraîneur Mario Tremblay l'a laissé croupir devant son filet lors d'une débandade face aux Red Wings de Detroit. Ce fut son dernier match dans l'uniforme tricolore...

«On dit souvent qu'un match ne fait pas une carrière. Mais j'espère que ce match-là n'a pas défait ma carrière à Montréal. Car il y a tellement plus de bonnes choses qui se sont passées durant mon séjour avec le Canadien.

«Heureusement, depuis quelques jours, on a l'occasion de parler davantage des équipes de 1986, de 1989 et de 1993. Et samedi, j'aurai la chance de revenir au Centre Bell en tant que joueur local...»

Un compétiteur né

Michel Roy a écrit une biographie de son fils, Le guerrier. C'est en quelque sorte l'image que Patrick souhaite laisser aux partisans du Canadien. «Je veux qu'on se souvienne de moi comme d'un compétiteur qui, tous les soirs, voulait être bien préparé pour jouer à un haut niveau. «Quand j'étais jeune, j'ai été retranché du midget CC. Si je n'avais pas persévéré, je n'aurais pu faire le saut au midget AAA l'année suivante, et encore moins avoir la carrière que j'ai eue.»

Cet instinct du vainqueur est essentiel au succès d'un gardien de but, croit Roy. Non seulement par ce qu'il en impose à l'adversaire, mais aussi pour l'image rassurante que cela renvoie à ses coéquipiers.

Le souvenir de 1993

La cérémonie de samedi soir fera la part belle à l'équipe de 1993 du Tricolore, celle qui a remporté la Coupe Stanley la dernière fois. Et quand on pense à cette année-là, difficile d'ignorer cette confiance que dégageaient Roy et le Canadien lors des 10 victoires consécutives en prolongation qu'ils ont arrachées. «On dirait que c'était plus facile pour moi de me concentrer et d'y aller un arrêt à la fois. Tout ce que je devais faire, c'était de donner assez de temps à mes coéquipiers pour qu'ils marquent en premier.

«En 1993, si la marque était égale après deux périodes, on en venait presque à souhaiter de se rendre en prolongation. On avait une telle confiance en nous-mêmes qu'on ne pouvait pas perdre.»