Le virus de la grippe A (H1N1) a déjà fait 2185 victimes et infecté près de 210 000 personnes dans le monde. Alors que plusieurs pays se préparent à combattre ce fléau, des voix s'élèvent pour affirmer que le Canada fait preuve de lenteur. Sera-t-il prêt à temps? Tout dépend du moment où le virus frappera.

Le Canada se prépare depuis plusieurs années à affronter une pandémie, stockant antiviraux, masques et gels antibactériens. Mais tout pourrait basculer si la deuxième vague attendue de grippe A (H1N1) frappe trop tôt cet automne, avant que le vaccin ne soit prêt.

 

Le fédéral et les provinces se préparent à une campagne de vaccination massive à compter de la mi-novembre. Le vaccin ne sera pas obligatoire, mais 50 millions de doses seront disponibles au pays. Les autorités estiment que jusqu'à 30% de la population pourrait être touchée par la maladie.

Si l'apogée de la grippe survient en janvier, comme c'est le cas depuis quelques années avec l'influenza saisonnière, tout pourrait bien se passer.

«Ce serait un scénario idéal parce qu'on aurait le temps de vacciner tout notre monde avant que le virus ne commence à circuler. Et avec une bonne vaccination, on réduirait considérablement l'impact de la maladie», estime le Dr Gaston de Serres, épidémiologiste à l'Institut national de santé publique du Québec et professeur en épidémiologie à l'Université Laval.

Le problème est que la deuxième vague de grippe A (H1N1) pourrait aussi frapper dès le mois de novembre, comme ce fut souvent le cas avec la grippe saisonnière par le passé.

Dans ce cas, le Canada n'est pas prêt, estime le Dr Paul Hébert, éditeur du Journal de l'Association médicale canadienne, qui signe un éditorial cette semaine pressant le gouvernement de vacciner plus rapidement les personnes à risque.

«Idéalement, il faudrait pouvoir vacciner les gens deux mois avant que le virus ne frappe, de façon à protéger le plus de monde possible», explique le Dr Hébert.

À ce jour, il estime que tant le fédéral que les provinces se sont bien préparés pour faire face à la pandémie. Les plans d'action semblent complets et sont mis à jour régulièrement.

Mais malgré toute la préparation possible, il n'existe que deux façons de prévenir la crise: l'accès à des antiviraux pour les personnes vulnérables et la vaccination. «On était prêts, mais tout à coup, il faut attendre jusqu'en novembre pour avoir le vaccin», déplore le Dr Hébert.

Tous les pays sont engagés dans la course à la production d'un vaccin. Des essais cliniques ont débuté au cours de l'été. Mais dans le meilleur des cas, il serait surprenant qu'un vaccin soit disponible avant octobre, estiment plusieurs.

Stocks de masques, d'antiviraux et de gels antibactériens

Au Québec, tant les hôpitaux que les écoles, les universités, les établissements publics et de nombreuses entreprises disposent d'un plan d'action pour agir face à une pandémie.

Au cours des dernières semaines, une trentaine de collèges ont ainsi fait affaire avec la firme Prudent, un groupe-conseil spécialisé dans la gestion des risques et la planification des mesures d'urgence, expliquait récemment le président-directeur général de la Fédération des cégeps, Gaétan Boucher, en rencontre à La Presse.

Comme plusieurs, l'Université de Montréal a fait installer 200 distributrices de gel antibactérien sur son campus. À l'entrée des hôpitaux, des agents de sécurité rappellent aux visiteurs de se désinfecter les mains.

Chaque hôpital dispose aussi d'une réserve de masques N-95 pour une semaine. Par la suite, en cas de besoin, ils pourront s'approvisionner dans la réserve nationale constituée par Québec.

«Nous sommes constamment en train de mettre nos lignes directrices à jour pour adapter nos pratiques selon les avancées médicales», souligne la porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux, Dominique Breton.

Difficile toutefois de s'assurer que toutes les mesures mises en place seront les bonnes. Ce n'est qu'une fois la crise passée, rétrospec-tivement, qu'on le saura, rappelle le Dr Brian Ward, directeur adjoint du Centre de recherche en maladies infectieuses et microbiologie du Centre universitaire de santé McGill.

«Nous sommes beaucoup mieux préparés que la grande majorité des pays et ce, malgré un délai très court», croit le Dr Ward. Il y a déjà plusieurs années que le Canada a signé un contrat avec la compagnie GlaxoSmithKline, l'assurant ainsi d'avoir accès à des doses suffisantes de vaccin lorsque cela serait nécessaire, rappelle-t-il.

Cet après-midi, des partenaires du Ministère de la Santé feront le point sur la situation au Québec.