Le virus de la grippe A (H1N1) poursuit sa lancée au Canada, troisième pays le plus touché après les États-Unis et le Mexique. Dix-sept nouveaux cas ont été recensés hier seulement, pour un total de 51 cas en une semaine. L'OMS a bon espoir qu'un vaccin soit prêt d'ici quatre à six mois. Entre-temps, les autorités canadiennes lanceront une vaste campagne d'information pour éviter la progression de la maladie.

Le Nouveau-Brunswick est devenu hier la sixième province touchée par la maladie après la Colombie-Britannique (15 cas), la Nouvelle-Écosse (14), l'Ontario (12) et l'Alberta (8).

 

Au Québec, la situation est demeurée stable et les autorités ne confirment toujours qu'un seul cas. Selon nos sources, il s'agirait d'un homme d'une trentaine d'années qui aurait contracté la maladie au Mexique. Les autorités provinciales refusent toujours de dévoiler le nombre de cas suspects.

Tous les Canadiens atteints souffrent d'une forme bénigne de la maladie et la plupart sont déjà rétablis ou en voie de l'être. Le virus H1N1 ne posséderait pas les caractéristiques génétiques qui avaient rendu la grippe espagnole de 1918 si virulente, a d'ailleurs affirmé hier une porte-parole des Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC), insufflant une rare bouffée d'optimisme - quoique modéré - à cette affaire. Selon les CDC, les personnes âgées de plus de 60 ans seraient aussi mieux protégées contre le virus parce qu'elles ont été exposées à plusieurs souches d'influenza au cours de leur vie, ce qui pourrait expliquer que la plupart des personnes atteintes depuis le déclenchement de la pandémie sont jeunes.

L'administrateur en chef de la santé publique, le Dr David Butler-Jones, a cependant prévenu qu'il est encore trop tôt pour conclure que la grippe H1N1 sera moins mortelle que ne l'a été la grippe espagnole ou que ne l'avaient laissé entendre les autorités au début de la semaine. «Le virus mute constamment», a-t-il insisté hier, lors de la conférence de presse quotidienne des autorités canadiennes. Il pourrait changer pour devenir plus ou moins virulent, a aussi dit le Dr Alain Poirier, directeur national de la santé publique du Québec: «Nous devons le surveiller de façon très précise.» Chose certaine, il y aura de plus en plus de cas «et nous allons voir des morts, comme avec chaque épisode de grippe saisonnière», a dit le Dr Butler-Jones.

Un vaccin réalisable

Il reste que, de manière générale, le ton se voulait rassurant, hier. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a affirmé qu'elle n'a «aucun doute qu'un vaccin efficace» contre la grippe porcine, rebaptisée jeudi grippe A (H1N1), pourra être conçu dans un délai «relativement court» de quatre à six mois.

«Il a été très difficile de mettre au point le vaccin contre le H5N1 (le virus de la grippe aviaire) mais, puisque l'industrie a réussi, nous n'avons pas de doute que la production d'un vaccin contre le H1N1 réussira aussi», a dit la Dre Marie-Paule Kieny lors d'un point de presse de l'OMS à Genève.

L'Organisation a déjà joint la majorité des entreprises pharmaceutiques en Europe, en Amérique et en Asie pour leur demander de se tenir prêtes à produire le nouveau vaccin, possiblement dès que le virus de la grippe aura été isolé en laboratoire. «Si nous ne recevons pas rapidement le signal que la progression de la maladie pourrait ne pas continuer, des entreprises vont commencer très vraisemblablement dès que ce sera possible et nous allons les appuyer», a indiqué la Dre Kieny. Entre 1 et 2 milliards de doses pourraient être produites au cours des 12 prochains mois, a-t-elle évalué.

De leur côté, les autorités canadiennes lanceront ce matin une vaste campagne d'information auprès de la population sur les moyens à prendre pour se protéger de la grippe A et des autres formes d'influenza, à grands coups de publicités dans les journaux, à la radio et à la télévision et même sur plusieurs sites internet, dont Facebook, Twitter et YouTube.

Les autorités vont rappeler aux Canadiens l'importance de se laver les mains régulièrement, d'éternuer dans le creux de leur coude et de rester à la maison s'ils sont malades. «Vous allez entendre ces messages partout. Notre expérience en santé publique démontre que ces mesures simples sont les plus efficaces», a fait valoir le Dr Butler-Jones.

Premier cas en Asie

Au moment de mettre sous presse, les plus récentes données faisaient état de 564 cas confirmés de grippe A (H1N1) dans 13 pays. On en comptait un peu moins de 500 la veille. Le virus a de plus gagné un nouveau continent, l'Asie, alors que le premier cas de grippe A (H1N1) a été confirmé à Hong Kong chez un ressortissant mexicain. Un cas suspect au Bénin fait craindre que la nouvelle grippe n'ait aussi atteint l'Afrique de l'Ouest.

L'Allemagne et la Grande-Bretagne ont chacune annoncé une contamination survenue à l'intérieur même de leur territoire - les deux premières transmissions entre humains en Europe. L'OMS a néanmoins maintenu son niveau d'alerte à 5, sur une échelle de 6.

Avec La Presse Canadienne, l'AFP et AP

 

Pandémie: Héma-Québec se prépare

Héma-Québec redoute les effets d'une épidémie de grippe sur les réserves de produits sanguins au Québec. «En cas d'épidémie, plusieurs donneurs ne pourront plus nous aider parce qu'ils seront malades ou en convalescence», a expliqué hier le Dr Gilles Delage, porte-parole du fournisseur de produits sanguins de la province. Héma-Québec a mis en branle un plan d'urgence qui devrait lui permettre de constituer une réserve de globules rouges suffisante pour subvenir à tous les besoins de la province pendant 12 jours, comparativement à8 jours en temps normal. Même en augmentant dès maintenant les objectifs et les activités de collecte de sang, cette opération devrait prendre de trois à quatre semaines, a évalué hier le Dr Gilles Delage. Il n'y a aucun risque de contracter l'influenza en donnant du sang.