Pour la troisième fois depuis son arrivée à la mairie, en 2001, Gérald Tremblay se sépare de son directeur général. Jugeant qu'il a été mal informé du dossier du contrat des compteurs d'eau, le maire de Montréal a demandé à Claude Léger de quitter son poste. Le directeur principal du Service des affaires corporatives, Robert Cassius de Linval, a dû faire de même.

À 40 jours des élections municipales, le maire Tremblay se sépare donc des deux cadres les plus importants de la métropole.

Après le passage de Guy Coulombe à la direction générale de la Ville (2001-2003), M. Tremblay avait reçu la démission de Robert Abdallah en mai 2006. Le nom de M. Abdallah, DG au début du processus d'attribution du contrat des compteurs d'eau, a été évoqué dans le dossier GÉNIeau. On a en effet appris en février dernier que, depuis le mois de novembre 2008, il dirige Gastier, filiale de Simard-Beaudry... qui fait partie du consortium GÉNIeau.

Titulaire d'un baccalauréat en génie et d'un autre en sciences juridiques, Claude Léger a été embauché pour remplacer M. Abdallah le 31 juillet 2006. Son contrat de cinq ans prévoyait un salaire annuel de 235 000$.

Claude Léger aura vécu une dernière année difficile avec le scandale de la SHDM et du Faubourg Contrecoeur, les enquêtes de la police et du vérificateur général, les voyages de Frank Zampino avec le fournisseur Tony Accurso, les voyages du directeur de la Réalisation des travaux, Robert Marcil, avec l'entrepreneur en construction Joe Borsellino, la fraude de 10 millions à la Division du service informatique, etc. Pourtant, il a récemment dit, dans une entrevue accordée à La Presse, faire tout son possible pour instiller intégrité et transparence dans les rouages de la Ville.

Le rapport du vérificateur général fait état de communications défectueuses entre l'appareil administratif et les élus. Claude Léger savait-il que PriceWaterHouse avait averti l'administration municipale d'«anomalies importantes» dans le processus d'attribution du contrat à GÉNIeau? Invité à s'expliquer, il n'a pas rappelé La Presse.

Avant de venir à Montréal, Claude Léger a été directeur général de la Ville de Montréal-Est de 1988 à 1998. Nommé DG de la Communauté urbaine de Montréal en 1998, il est choisi DG de la Ville de Longueuil en 2001 avant de devenir vice-recteur à l'administration et aux finances de l'Université de Montréal en 2005.

De son côté, Robert Cassius de Linval, âgé de 42 ans, quitte une administration avec laquelle il est associé de près depuis l'arrivée de Gérald Tremblay à la mairie. Diplômé de l'UdM et titulaire de la bourse Rhodes en 1991, il a été membre fondateur du mouvement souverainiste Génération Québec en 1995. En 1997, il fait du journalisme avec CyberSciences. Devenu avocat spécialisé dans les technologies de l'information, il a été associé à la firme Benyekhlef, Labrèche et Cassius de Linval. En 2000, il a été vice-président aux affaires juridiques de la firme eResolution, qui a disparu quatre ans plus tard. Il a aussi travaillé au cabinet Fasken Martineau Walker.

Juste après l'élection de Gérald Tremblay en 2001, il est devenu conseiller juridique du maire et du comité exécutif.

Avec l'aide de Robert Abdallah et de Frank Zampino, il a obtenu en novembre 2003 une promotion importante: directeur principal des affaires corporatives, un poste bien mieux payé, qu'il occupait jusqu'à hier. Il avait aussi la responsabilité du contentieux de la Ville.

En 2005, il a été secrétaire du conseil d'administration des XIes Championnats du monde FINA.

En 2007, le comité exécutif le charge de mandater son ex-firme Fasken Martineau pour enquêter à Outremont, un contrat de 50 000$. L'enquête administrative sur l'affaire Harbour est circonscrite aux employés de l'arrondissement, ce qui est alors critiqué, car les enquêteurs n'ont pas rencontré les élus locaux.

Au printemps dernier, le chef de l'opposition officielle, Benoit Labonté, a demandé la démission de Robert Cassius de Linval. Il considérait que le scandale de la SHDM avait débuté quand l'administration Tremblay-Zampino avait retenu, en 2006, un avis juridique de Me Jean Hétu, sur le conseil de M. Cassius de Linval. Plutôt que d'en référer à Québec, la Ville avait alors procédé à une privatisation partielle de la SHDM en faisant confiance à la voie suggérée par Me Cassius de Linval.

Finalement, la Ville a réintégré la SHDM dans son giron. M. Cassius de Linval est toutefois demeuré membre du conseil d'administration de la SHDM. Joint à son domicile hier, il n'a pas souhaité faire de commentaires sur son départ.

M. Léger et M. Cassius de Linval sont-ils congédiés? Le maire a-t-il réclamé leur démission? Est-ce un départ d'un commun accord? Le Service du capital humain n'était pas capable de le dire, hier soir. S'il s'agit d'un congédiement ou d'une démission, les deux cadres n'auront droit à aucune indemnité de départ, mais ils pourront exercer des recours devant les tribunaux. S'il s'agit d'un départ «volontaire», ils auront droit à une indemnité d'un an de salaire.