Je vous présente Joseph. À 18 ans, le médecin lui a annoncé qu'il souffrait d'une maladie incurable. Quatre fois par jour, il doit prendre plusieurs types de médicaments afin de ne pas trop ressentir les effets de sa maladie. Oui, il a déjà essayé d'arrêter sa médication, mais chaque fois il a dû être hospitalisé d'urgence, ce qui fait qu'il a appris sa leçon.

Présentement, Joseph travaille 18 heures par semaine sur un plateau de travail au CHUS. Il s'occupe de la récupération du papier. Il réalise aussi plusieurs autres tâches connexes.

Là où il habite, on l'a embauché pour tondre la pelouse l'été, pour pelleter l'hiver et pour aider à tout autre travail d'entretien. À plusieurs reprises, on l'a invité à parler de sa maladie au cégep ainsi qu'à l'université.

Parfois, il lui arrive de se fatiguer plus rapidement que d'autres. Il doit alors se reposer et faire une sieste. Néanmoins, son ménage est toujours fait, il est propre, les ordures sont au chemin toutes les semaines, le chat est nourri et la litière est nettoyée. Sans oublier le lavage et toutes les autres tâches domestiques qu'il effectue sans difficulté et avec entrain.

Bien que toutes ces activités occupent beaucoup Joseph, il trouve le temps de se détendre en s'adonnant à plusieurs passe-temps. Il dessine des portraits, cuisine, fait de la marche, mange au restaurant, va à la piscine et visite sa famille.

Si on lui demande un service, il s'empresse d'offrir son aide. Son plus cher désir est de travailler à temps plein et de s'intégrer totalement dans la société. De plus, Joseph a eu plusieurs expériences de travail qui ont été très positives selon moi, comme la conciergerie ou l'entretien des terrains.

Bien que cet homme ait un peu de difficulté à articuler, si un jour vous cognez à sa porte, il s'empressera de faire connaissance avec vous. Qu'est-ce que Joseph pourrait bien vous raconter durant cette discussion?

Il serait possible qu'il vous explique que, malgré tout ce qu'il fait, il souffre d'une maladie mentale. En fait, il est atteint de schizophrénie.

Surpris? Est-ce à cela que vous vous attendiez?

Je suis stagiaire en technique de travail social dans une résidence pour personnes atteintes de schizophrénie. Vous avez lu le fait vécu d'une personne atteinte de ce trouble de santé mentale.

Chaque jour, cet homme prend ses médicaments et il est suivi par des psycho-éducateurs, des psychiatres et des travailleurs sociaux. Contrairement à certaines croyances, il n'est pas dangereux pour la population et il n'est pas un clochard.

La santé mentale peut prendre bien des visages, dont celui d'une personne tout à fait fonctionnelle. Malheureusement, il arrive que, dans les médias, l'image de la schizophrénie soit éloignée de la réalité. Pensons au cas de Vice Li, qui a décapité un passager dans un autocar au Manitoba. Ces faits sont véridiques, mais aurait-on omis de mentionner que, dans ces situations extrêmes et tragiques, ces gens ne prenaient pas leur médication et qu'ils étaient laissés à eux-mêmes, sans encadrement adéquat?

J'espère que cette lettre vous aura permis de jeter un nouveau regard sur la schizophrénie et que d'autres actions concrètes seront prises pour valoriser ces personnes en soulignant leurs bons coups et leurs réussites.

L'auteure réside à Sherbrooke.