C'est connu, les Québécois sont des gens pleins d'idées. Cependant, pour que ces idées se transforment en entreprise, il faut du capital. Et puisque environ la moitié des démarrages ne survivent pas à leur quatrième anniversaire, ce capital viendra rarement d'une banque; il faut du capital de risque.

Outre la disponibilité du capital, le principal facteur qui influe sur ce taux de survie est la qualité des décisions d'affaires prises au cours de ces premières années, moment où une seule erreur peut mettre l'entreprise en faillite. Le programme des Fonds d'intervention économique régionaux (FIER) a été taillé sur mesure pour cet environnement: il combine un incitatif pour que les investisseurs privés acceptent de prendre ce genre de risque et la participation obligatoire de plusieurs investisseurs privés qui sont des gens d'affaires chevronnés. Parce que l'argent de ces investisseurs est à risque, ils sont incités à accompagner les jeunes entreprises dans lesquelles ils investissent pour ainsi augmenter leurs chances de succès. De plus, le risque que prend le gouvernement est le même que celui qu'acceptent les investisseurs; si la compagnie fait faillite, le gouvernement et l'investisseur perdent leur argent. Si, au contraire, la compagnie est un succès, tous vont faire un rendement et le Québec comptera une nouvelle entreprise et de nouveaux emplois à long terme.

 

Lors de sa création, le programme des FIER répondait donc à une carence d'accès au capital de risque pour le démarrage et les premières phases de développement des entreprises, principalement en région. Cette constatation suivait le dépôt du rapport Brunet sur le capital de risque. La gestion du programme a été confiée à Investissement Québec qui a émis un certain nombre de règles communes à tous les FIER. Ces règles incluent principalement:

- l'obligation de regrouper au moins cinq personnes d'affaires différentes ayant une expérience pertinente et devant investir au moins 150 000$ chacune;

- un processus d'autorisation des placements incluant la nomination par Investissement Québec d'un observateur indépendant qui assiste à toutes les réunions du comité de placement du FIER;

- la mise en place d'une politique de placement qui établit les règles quant au type d'entreprises pouvant être financées, au type d'instrument financier pouvant être utilisé et au montant maximum permis pour chaque placement;

- la mise en place d'une politique en matière de conflit d'intérêts.

La politique de placement est à la fois souple et encadrante, laissant le soin aux investisseurs privés de trouver les bonnes occasions d'affaires là où elles se trouvent tout en empêchant l'investissement dans certains secteurs (par exemple, en immobilier). De plus, comme un objectif indirect du programme est de créer des emplois, on a misé sur l'importance de créer ou sauver des emplois plutôt que sur la forme juridique des entreprises. C'est ainsi qu'une entreprise de très haute technologie dont l'usine était située à Pointe-Claire a pu être financée même si sa forme juridique était une société de la Nouvelle-Écosse.

La politique de placement permet d'investir 50% des fonds à l'extérieur de la région désignée d'un FIER. Je crois que, sans cette ouverture, il aurait été très difficile de créer des FIER dans plusieurs régions du Québec. En fait, à part les grandes villes, peu de régions peuvent générer un nombre d'opportunités suffisantes pour justifier la mise en place d'une structure formelle d'investissement. Même si le potentiel de génération des bonnes idées et l'entrepreneuriat sont parfaitement répartis dans la population, le problème pour certaines régions est leur faible population. (...)

CHARLES SIROIS

L'auteur est président du conseil et chef de la direction de Télésystème. Télésystème est un investisseur et un gestionnaire du FIER ID, en plus d'être investisseur passif dans plusieurs autres fonds de capital de risque et FIER au Québec.