On peut observer un nouveau rituel lors des congrès des partis nationaux américains qui se déroulent tous les quatre ans: chaque fois, les Américains se demandent: «À quoi bon?»

Autrefois, les délégués au congrès du parti choisissaient le candidat et il leur arrivait occasionnellement de faire un choix étonnant. De nos jours, le système des primaires désigne le candidat plusieurs semaines avant la tenue du congrès, lequel est devenu un exercice compliqué d'entérinement d'office.Même cette année, au terme d'un long combat serré pour l'investiture démocrate opposant Barack Obama et Hillary Clinton, Obama s'est assuré d'être le candidat choisi il y a des mois. En principe, il pourrait y avoir une surprise cette semaine, en particulier parce que les super délégués, qui ne sont pas choisis par les primaires d'État, peuvent changer leur fusil d'épaule jusqu'aux derniers instants avant de voter. Mais même les farouches partisans de Clinton, qui ne s'avouent jamais vaincus, ne comptent pas sur cette mince possibilité.

Il reste que la sénatrice Hillary Clinton et son mari, l'ancien président Bill Clinton, ont instillé du suspense dans ce rituel pratiqué de plus en plus pour la forme. Les deux Clinton vont s'adresser aux délégués et chaque mot formé par leurs lèvres sera pesé, chaque soupir analysé, et chaque changement du langage corporel décortiqué pour y déceler de l'hostilité à l'égard d'Obama. Mais pour apaiser Hillary Clinton et pour satisfaire à sa demande de fournir une «catharsis» à ses partisans, il y aura un vote par appel nominal. (...)

Hillary Clinton

Les Clinton transformeront cet appel nominal en une démonstration colorée de la «clintonmanie», soi-disant pour contribuer à l'unification du parti, alors que ce sera vraisemblablement beaucoup plus pour démontrer la puissance d'Hillary et faire ressortir la faiblesse d'Obama. En outre, Obama voit à l'heure actuelle sa cote baisser dans les sondages tandis que les Américains se demandent ce qu'il est vraiment et quelles sont ses positions.

Tous ces éléments préparent la scène pour un discours éblouissant et si quelqu'un peut se montrer à la hauteur d'un tel discours, c'est bien Barack Obama. Celui-ci a démontré maintes et maintes fois ses talents d'orateur et le calme nécessaire pour relever les défis lorsqu'ils se présentent. Il reste pourtant que c'est un exercice très difficile de se dire «Comment écrire quelque chose de mémorable?» ou «Comment puis-je faire encore mieux?»

Pendant que les Clinton, les Obama et les candidats à la vice-présidence vont susciter le plus grand nombre de manchettes (et le plus de mitraillages de la part des photographes), des politiciens moins en évidence travailleront sur un document aussi important qu'un discours de candidature ou d'acceptation. Le programme national des démocrates, qui sera présenté au congrès, exposera les grandes positions du parti. Des observateurs attentifs vont comparer le discours d'Obama et le programme et chercheront à percevoir toute déviation du candidat par rapport au texte du parti. De plus, le programme indiquera si le parti cherchera à miser sur sa base au cours de cette campagne électorale ou s'il dirigera l'action depuis le centre.

Tant de choses étant dans la balance, il se peut que, dans quatre ans, les Américains ne se demandent pas plus qu'aujourd'hui si les congrès ont toujours leur raison d'être; tradition oblige, ils s'attacheront encore à accorder leur attention aux personnalités importantes, aux symboles et aux prises de position mises en lumière lors du congrès.