Les énergies consacrées à l'adoption de la loi 49, instaurant un nouveau régime de relations de travail pour les ressources de type familial et intermédiaires, ont occulté l'attention du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) sur l'existence d'un système à deux vitesses. C'était sa priorité et pas la nôtre.

Depuis plus de deux ans, il existe un double traitement pour près de 800 jeunes en difficulté hébergés dans des ressources intermédiaires qui relèvent directement de la Loi de la protection de la jeunesse et des Centres jeunesse.

L'État nous confie ces enfants de 3 à 18 ans pour que nous leur garantissions un espace de vie se rapprochant de leur milieu familial. C'est une alternative efficace à l'institutionnalisation qui facilitera leur intégration dans la société. Ce type de ressources, dispensant des services de réadaptation, prend la forme de résidences de groupe, de maisons d'accueil ou d'appartements supervisés. Elles sont uniques au Québec. Elles coûtent beaucoup moins cher à l'État pour des services absolument équivalents à ceux des Centres jeunesse.

Selon la loi, tout jeune a droit aux mêmes services et aux mêmes avantages, qu'il soit placé en ressource externe ou dans un établissement. Les jeunes en difficulté hébergés dans les Centres jeunesse profitent d'une prestation complète de services financée par l'État. Les ressources intermédiaires parviennent à offrir les mêmes services avec un budget de deux à trois fois inférieur. Pourtant, le ministère de la Santé et des Services sociaux nous exige par contrat de fournir en tout temps 100 % des services requis par les jeunes. Le financement n'est cependant pas garanti à 100 %, ce qui peut engendrer un déficit financier à chaque mois.

Notre conseil d'administration constate que certaines ressources fonctionnent depuis longtemps « sur la marge de crédit » de leur institution financière. Des embauches sont retardées, des mises à pied sont effectuées. Cela compromet l'équilibre des jeunes en difficulté et compromet la stabilité du lien affectif avec les enfants.

Toutes ces contraintes financières ne nous permettent plus de garantir un salaire adéquat aux intervenants et d'assurer une stabilité dans le personnel d'encadrement. Il faudra bientôt limiter au minimum les activités récréatives et restreindre certains achats. Cela amènera une dégradation des services offerts aux jeunes.

Vous connaissez un entrepreneur, privé ou à vocation sociale, qui accepterait de s'engager totalement sans garantie que tous ses services soient rétribués? Pourtant, nous le faisons. Nous hébergeons les enfants que nous confie l'État. Ce n'est pas rien.

La ministre déléguée aux services sociaux a démontré une réelle ouverture à corriger ces iniquités qui pénalisent les jeunes, mais l'appareil gouvernemental semble lui donner beaucoup de fil à retordre.

Cet automne, tous les groupes du secteur public entreprennent leurs négociations avec l'État pour le renouvellement de leurs conditions de travail. Les ressources intermédiaires et les enfants passeront-ils en deuxième?