Qui ne s'est jamais senti blessé après avoir été la cible d'une blague douteuse? Et qui, sous le masque de l'humour, n'a jamais tenu de propos désobligeants envers quelqu'un? La lecture d'articles relatant les événements du festival Juste pour rire m'a fait longuement réfléchir sur la problématique de l'humour controversé.

Qui ne s'est jamais senti blessé après avoir été la cible d'une blague douteuse? Et qui, sous le masque de l'humour, n'a jamais tenu de propos désobligeants envers quelqu'un? La lecture d'articles relatant les événements du festival Juste pour rire m'a fait longuement réfléchir sur la problématique de l'humour controversé.

Les notions de liberté d'expression, de censure ou de rectitude politique sont souvent utilisées pour débattre sur le sujet, mais rarement on entend parler de bienveillance ou d'empathie. L'humour fait partie de nos vies au quotidien. Je crois qu'on gagnerait tous à réfléchir à la question...

Un article dans lequel on rapportait les propos de gens parodiés nous sensibilisait à ce que peuvent ressentir les «victimes» de l'humour. Bien sûr, plusieurs essaient d'en rire et certains font des hypothèses sur la raison pour laquelle on les a parodiés, telles la preuve de leur importance ou de l'amour qu'on leur porte. Mais d'autres vivent cela plus difficilement et certains, blessés, et n'arrivant probablement pas à trouver une explication favorable à leur estime de soi, choisissent de poursuivre ceux qui leur font du tort.

Puis, il y a les motivations des humoristes. Vouloir faire rire, faire du bien au public. Vouloir dénoncer. Dénoncer la vanité, l'intolérance, les préjugés...

Je crois aux bienfaits du rire, à l'importance de ne pas se prendre trop au sérieux, de savoir dédramatiser. Et je suis d'accord avec l'idée de vouloir dénoncer les travers humains. Au-delà du rire, cela peut faire réfléchir. Mais lorsqu'il y a des individus spécifiques qui sont ciblés, ça devient délicat. Comment s'assurer d'être respectueux? Est-ce un critère recherché? Préfère-t-on «l'humour méchant»? Lorsque des gens parodiés réagissent mal, doit-on seulement l'attribuer à leur niveau de susceptibilité? A-t-on considéré l'impact de nos propos sur ces individus? Minimise-t-on cet impact?

On peut blâmer la rectitude politique ou la censure. Et certains suggèrent de faire appel aux tribunaux pour les cas litigieux. Mais je crois que chacun peut juger, au fond de lui, si son intention est bienveillante ou malveillante. Lorsqu'un individu ou une situation éveille en nous du mépris, un sentiment de supériorité ou toute autre émotion négative, cela risque de transparaître. Et d'être blessant.

Lorsque j'étais à l'école primaire, et qu'un élève faisait rire la classe en se moquant d'un autre élève, un fort sentiment de désapprobation s'élevait en moi et je me sentais touchée par la peine de cet enfant. Vingt ans plus tard, la même émotion monte en moi lorsque je perçois une situation similaire dans le monde des adultes. Ce genre de situation devient-il plus acceptable en vieillissant?

A-t-on regardé en soi quels comportements ou quels propos on pourrait à notre tour nous reprocher? Serait-ce aussi drôle s'il s'agissait de soi, la personne ridiculisée? Ou de notre père, notre soeur, notre ami? Quelle est la limite de ce que l'on pourrait accepter? Au risque de paraître moralisatrice, naïve ou idéaliste, je crois que de se questionner sur l'intention et l'impact de nos gestes serait souvent souhaitable, et cela semble particulièrement vrai dans les spectacles humoristiques, médiatisés, où la réputation des gens peut facilement basculer. Introspection, empathie, indulgence et compassion, peut-être est-ce une piste pour réfléchir et juger si un numéro humoristique (ou une blague que l'on fait) est acceptable ou non.

L'auteure réside à Montréal.