La semaine dernière, la Cour fédérale du Canada a jugé que le refus du gouvernement canadien de demander le rapatriement de M. Omar Khadr au Canada «constitue une atteinte à un principe de justice fondamentale et une violation des droits de M. Khadr au Canada en vertu de l'article 7 de la Charte». La Cour a ordonné au gouvernement de solliciter le rapatriement de M. Khadr dès que cela sera possible.

Le lendemain du jugement, l'Association du Barreau canadien a rédigé une lettre adressée au premier ministre Stephen Harper et au président des Etats-Unis, Barack Obama, exhortant leurs gouvernements respectifs de collaborer, dans les plus brefs délais, afin de faciliter le rapatriement de M. Khadr, le seul ressortissant d'un pays occidental encore détenu dans la prison de Guantánamo Bay.

Cela fait presque deux ans que nous nous élevons contre le procès militaire de M. Khadr et que nous exigeons son rapatriement. Remarquez que nous ne prenons pas position quant à sa culpabilité ou son innocence. Notre souci se résume à ceci : M. Khadr doit être en mesure de se prévaloir de son droit à un procès équitable et mené conformément aux mesures de protection procédurales ainsi qu'aux considérations particulières qui sont accordées à un mineur, telles que prévues par les lois canadiennes et le droit international. Le système de justice canadien est fort bien équipé pour porter un jugement équitable, et de manière transparente, quant à la culpabilité de M. Khadr tout en tenant compte de son statut de mineur au moment du crime allégué.

Nous avons accueilli favorablement la décision du président Obama de se donner un an pour fermer la prison de Guantánamo Bay et de confier à ses fonctionnaires la tâche d'examiner le statut de tous les prisonniers. C'est certainement un pas dans la bonne direction.

Il reste que M. Khadr n'avait que 15 ans, lorsqu'il a été blessé au combat en Afghanistan, et était donc un enfant en vertu des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. On a privé M. Khadr des protections les plus élémentaires de la procédure équitable, normalement la moindre des choses dans un état où règne la primauté du droit. Il s'est vu priver du droit de consulter un avocat et le droit de savoir ce dont il était accusé.

Par ailleurs, on ne lui a pas reconnu ses besoins particuliers ou son statut en tant que mineur, comme l'exige le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés.

M. Khadr a été détenu avec l'ensemble des autres prisonniers à Guantánamo Bay, sans avoir accès aux soins physiques ou psychologiques ou aux services pédagogiques qui auraient contribué à sa réinsertion. La Cour fédérale du Canada a jugé que le traitement réservé à M. Khadr constituait une violation des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant et la Convention contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains et dégradants.

Le moment est venu pour que le gouvernement canadien avise les Etats-Unis qu'il est disposé à négocier les conditions de rapatriement de M. Khadr au Canada, afin de faire face à la justice canadienne. Nous exhortons également le gouvernement des Etats-Unis à négocier les conditions de rapatriement de M. Khadr avec le gouvernement canadien et à transférer celui-ci toute preuve disponible relative à sa conduite.

Les deux dirigeants doivent arriver à une entente qui reconnaisse les obligations internationales de respect des droits de la personne, de la procédure équitable et de la primauté du droit, ainsi que l'intérêt d'assurer la sécurité nationale de nos deux pays.

L'auteur est le président de l'Association du Barreau canadien.