Depuis quelques jours, Facebook me bombarde de vidéos de cruauté animale plus bouleversantes les unes que les autres.

Surgissent-elles pour faire un contrepoids insidieux aux efforts de protection animale portés par des sites en multiplication comme la SPCA, Humane Society et The Dodo ? Ou alors sont-elles intuitivement partagées pour que la perversion atteigne un comble et soit enfin socialement renversée, comme le pressent le philosophe Jean-Marc Tonizzo ? Ce qui m'est proposé à voir sur le web est littéralement le meurtre froidement filmé de créatures sensibles.

Pardonnez ma révolte, mais je suis incapable de passer à autre chose et de continuer ma journée.

Je me suis longtemps demandé pourquoi la question de l'éthique animale me touchait au point d'avoir fait du bénévolat pour la cause. Des gens m'ont déjà suggéré d'investir plutôt mes énergies à sauver mes semblables.

Puis, je me suis souvenue de ce que le caricaturiste (et critique de société) William Hogarth a illustré dans The Four Stages of Cruelty, quatre gravures datant de 1751. Dans la fable graphique, le personnage de Tom Nero commence dès l'enfance à torturer un chien par plaisir. Devenu cocher à l'âge adulte, il torture son cheval. Il passe ensuite au meurtre d'une enfant et, pour ce crime, il sera jugé, pendu et disséqué, privé de sépulture et du repos éternel.

Ce sont les quatre stades de la cruauté, selon Hogarth ; ils illustrent avec un entendement louable pour l'époque que l'absence d'empathie pour les animaux explique ou expliquera éventuellement l'absence d'empathie pour ses frères humains. Si la violence est le vestige d'une agressivité nécessaire à notre survie en des temps préhistoriques, la cruauté est aujourd'hui une entrave à notre évolution. Y mettre un terme n'est même pas une option.

Voilà sans doute pourquoi l'éthique animale m'est tatouée sur le coeur. Cette éthique repose sur la prévention, sur l'adoption de lois qui sortent l'animal du statut commode d'objet et de vulgaire bien économique. Il est temps de soigner le mal à sa racine. L'empathie prônée par les Jane Goodall et Mathieu Ricard ne survient pas à la suite d'une infusion divine ; elle est instillée de manière culturelle, elle résulte d'une prise de conscience au quotidien, d'une prise de position quand on achète.

À l'heure où notre premier ministre Trudeau cherche la façon diplomate d'aborder la question des droits de la personne avec la Chine, je me questionne sur l'ordre dans lequel les changements souhaités vont se produire ; le sujet de la protection animale n'est pas sans intérêt dans ce pays où l'on élève, vole, enferme deux millions de chats et de chiens chaque année pour ensuite les faire mourir des plus sordides manières (qui ne connaît pas le festival de viande canine de Yulin fera bien de se renseigner), qu'on en fait du cuir et de la fourrure qui circule encore librement en Europe, que l'on vous refile ensuite dans des manteaux, des jouets, des figurines.

Sans le vouloir, vous avez participé à la cruauté animale.

Au Québec, nous sommes loin d'être purs. Parlez-en aux gens de la SPCA, de PETA, de la Humane Society... Heureusement, nous cheminons. Oui, l'humain au sommet, mais n'oublions pas de soigner la racine. « I'm a Street Dog Defender. » Je suis une défenseur des animaux abandonnés et maltraités. Ça, je l'ai mis sur Facebook, et chaque geste compte.