La dépression est un sujet à l'ordre du jour, un propos que l'on inscrit à son agenda. Si nous n'avons jamais vécu de dépression, nous connaissons tous au moins une personne à qui elle a rendu visite.

Parfois, elle s'installe longtemps, un peu comme l'enfant qui revient vivre chez ses parents parce que sa maison est en rénovation. On se demande quand il va partir, mais les travaux semblent toujours s'éterniser. Il y a toujours un imprévu, quelque chose de plus à réparer.

D'autre fois, la visite est plus courte. C'est la grand-tante que l'on voit une fois par année. Celle qui entre et qui sort en coup de vent, le temps de nous rappeler qu'elle existe et qu'elle peut débarquer à tout moment.

Pour certains, la dépression n'est pas une maladie ; il suffit de choisir le bonheur, comme on choisirait un parfum de crème glacée le 21 juin. Parmi tous les choix savoureux, allant de barbe à papa à carré au fudge, pourquoi quelqu'un bouderait la crème glacée ? Tout le monde aime ça ! Suffit de trouver le parfum qui nous convient et le tour est joué.

Malheureusement, ce n'est pas si simple. Il ne suffit pas de « choisir le bonheur » pour être heureux.

Personne ne se lève un matin en décidant d'être malheureux, en réalisant qu'une dépression ajouterait un petit quelque chose à sa vie monotone.

Certaines personnes peuvent être en dépression durant des années, doivent être médicamentées et suivies très étroitement par des professionnels. Malgré tout, ce serait un choix. Je ne sais pas pour vous, mais en ce qui me concerne, ce n'est pas celui que je ferais.

En plus de pouvoir être causée par un débalancement hormonal, ce qui est totalement hors du contrôle de la personne affectée, elle peut être causée par une multitude d'épreuves vécues par celle-ci. Qui sommes-nous pour juger la souffrance d'autrui ? Cessons de faire l'erreur de ramener ce que les autres vivent à nous. Ce n'est pas parce que nous sommes passés par-dessus quelque chose de similaire, sans dépression, que cela doit minimiser le ressenti de l'autre par rapport à l'événement.

Non, il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. Non, il ne suffit pas de se lever un matin, de regarder à travers les rideaux et de choisir d'être heureux. Non, il ne suffit pas de changer d'emploi pour régler ses problèmes. Lorsque les factures s'empilent au rythme des jours qui filent, que le plus vieux a besoin de broches et la plus jeune de lunettes, ne laisse pas son emploi qui le veut du jour au lendemain. Cessons d'être aussi simplistes et de proposer des phrases préfabriquées.

La dépression devient banale, mais reste encore taboue. « Ah, c'est juste une dépression. » Je n'ai jamais été en dépression. Seulement, j'ai côtoyé de très près des personnes dépressives et les effets sont tangibles ; ils vivent à l'intérieur des personnes touchées et se répercutent sur ceux et celles qui se trouvent autour. La dépression n'est pas insignifiante, elle a des conséquences palpables qui prennent souvent beaucoup d'espace, jusqu'à le prendre totalement.

La dépression existe. Elle ne porte pas un nom pour rien. Il est important de la nommer sans la montrer du doigt.

À défaut de comprendre, il est important d'écouter, de prêter son épaule. Ne pas juger, ne pas minimiser. À défaut de comprendre, nous pouvons être là, nous pouvons calmer et rassurer.

À défaut de comprendre, nous pouvons aimer.