Depuis le dépôt du projet de loi 10 visant à modifier l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux, notamment par l'abolition des agences régionales, et son adoption le 6 février 2015, plusieurs organismes et intervenants du réseau remettent en question le bien-fondé de cette réforme et la vitesse de son implantation.

Ce message de prudence se retrouvait aussi dans la majorité des mémoires déposés lors des consultations en commission parlementaire. Ce qui ressortait notamment de ces mémoires, c'est l'absence de consensus scientifique sur les bienfaits d'une centralisation abusive dans un réseau de santé et de services sociaux. Un an après son adoption, nous sommes en mesure de dresser un premier bilan.

Parmi les conséquences de cette réforme, nous avons vu disparaître un à un les lieux qui pouvaient par un oeil objectif et indépendant soulever des mises en garde à l'implantation de celle-ci.

Pensons entre autres à l'Association des établissements de la Santé et des services sociaux du Québec (AQESSS), à la diminution du nombre de conseils d'administration et à l'abolition du poste de Commissaire à la santé et au bien-être.

PRÉOCCUPATIONS LÉGITIMES

Quand des membres du personnel disent ne plus se retrouver dans cette réforme, quand les professionnels soulèvent des préoccupations légitimes sur l'impact de cette dernière sur leurs pratiques professionnelles, quand des associations de cadres joignent leur voix aux mêmes préoccupations, c'est que nous assistons à une démonstration de plus en plus claire des ratés de cette réforme. 

Ajoutons à cela l'intervention d'anciens dirigeants du réseau, qui réclament l'intervention de la Vérificatrice générale pour évaluer de façon indépendante la réforme sur deux questions précises : les soins et services à la population subissent-ils les conséquences de la réforme ? Les économies promises sont-elles vraiment au rendez-vous ?

Rappelons que lors des Rendez-vous nationaux sur l'avenir du système public de santé et de services sociaux, un large consensus se dégageait à l'effet qu'une réforme de structure n'est pas la solution pour améliorer l'accès aux services pour la population. À cette occasion, plus de 400 participants provenant du réseau de la santé et des services sociaux, de la population, des groupes communautaires, des organisations syndicales, de gestionnaires et d'ordres professionnels arrivaient aux mêmes conclusions.

Dans quel état se retrouvera ce réseau si l'implantation de cette réforme se poursuit sans en faire un état de situation ? Et surtout, qui vivra les conséquences d'une implantation à l'aveugle ?

Le ministre Barrette ne peut faire la sourde oreille à ces appels répétés. Il est plus que temps qu'il passe en mode écoute et qu'il revoie ses façons de faire. Alors que le bilan est désastreux un an après l'adoption du projet de loi 10, le ministre Barrette et le gouvernement Couillard se doivent de mettre immédiatement un moratoire à leur réforme.