Les cégepiens sont de plus en plus stressés et c'est inquiétant. La cote R, la pression d'entrer dans un programme qui demande une moyenne X, sans compter le désir de faire un peu d'argent pour se permettre une certaine autonomie financière, l'envie d'avoir une vie sociale stimulante, peut-être même une vie amoureuse.

Dans un récent texte sur le stress des cégépiens, la journaliste Sophie Allard mettait en lumière ce problème criant, méconnu de notre société. On le voit aussi au Collège de Maisonneuve, où j'enseigne. Une majorité d'élèves veulent être performants dans toutes les sphères de leur vie, chose qui est pratiquement impossible.

Selon le sociologue Jean-Philippe Warren, ce désir de performance et ce culte du gagnant leur sont imposés socialement depuis leur naissance. Plusieurs tombent dans le piège et, malheureusement, trop souvent aux dépens de leur santé physique et mentale...

J'enseigne l'éducation physique. Un des cours que nous offrons se nomme « gestion de stress par l'activité physique ». C'est le cours le plus populaire de tous ceux offerts dans notre cégep. Onze groupes d'une trentaine d'élèves ont été ouverts à l'hiver 2016. Une clientèle majoritairement féminine, prise avec de sérieux problèmes de stress et d'anxiété.

Il s'agit de leur dernier cours d'éducation physique au collégial, et même à vie. Les élèves ont pour objectif final de devenir autonomes dans leur pratique d'activité physique. Méchant contrat... Surtout lorsque l'on considère que plusieurs d'entre eux ont vécu des expériences négatives en lien avec l'activité physique dans le passé tout simplement parce qu'ils ont été moins choyés génétiquement et socialement dans leurs rapports avec le mouvement.

Ce cours met l'accent sur l'utilisation de l'activité physique et des saines habitudes de vies pour réduire le stress. Les élèves rencontrent une psychologue qui décortique avec eux le phénomène du stress en lien avec leurs études. Plusieurs lectures portant sur les réactions physiologiques du stress sont également introduites.

D'un point de vue plus pratique, les élèves vivent de façon hebdomadaire une variété d'entraînements de type cardio-vasculaires (continu, intervalles, en circuit), de séances d'étirements (yoga, étirements statiques, Pilates) ainsi que de séances de relaxation (méditation, respiration training autogène, contraction relâchement de Jacobson).

Plusieurs études récentes démontrent l'impact de l'activité physique cardio-vasculaire régulière et de la relaxation sur la réduction de la tension et du stress quotidiens. Les élèves le vivent, le réalisent et surtout, le sentent.

Force est de constater qu'à la fin du trimestre, beaucoup d'entre eux ont significativement amélioré leur rapport à l'activité physique. Ils réalisent que jumelée avec un peu de relaxation et de respiration consciente, elle leur permet de vivre moins stressés. Ils ont fait la paix avec l'activité physique. Ils ne la considèrent plus comme « performante », mais plutôt comme « aidante ». Une sorte de douche intérieure. Une hygiène de vie qui permet de se rapprocher du bien-être, peut-être même du bonheur.

L'article de Mme Allard parle du manque de ressources pour affronter la situation alarmante du stress au cégep. Les éducateurs physiques ont un rôle majeur à jouer en ce sens. En fait, avec un cours comme celui que nous offrons, nous sommes déjà proactifs et en mode solution. En partenariat avec le service psychologique, nous sensibilisons déjà les étudiants au phénomène grandissant du stress.

De la belle éducation « par le physique » pour en arriver à un certain équilibre entre le corps et l'esprit.