Commerces, bureaux, cinémas, salles de spectacle, aquaparc, agora, toits verts: le projet de supercentre commercial Royalmount est un autre de ces Walt Disney de la consommation que l'on retrouve un peu partout aux États-Unis et ailleurs dans le monde.

Ce modèle favorise un style de vie banlieusard basé sur l'utilisation de l'automobile et la consommation globalisante, regroupant dans un même lieu la plupart des marques commerciales existantes.

L'accueil du maire de Ville de Mont-Royal, Philippe Roy, à ce projet de mégacentre commercial, procède d'un réflexe classique: d'un côté, le promoteur cherche à éliminer la concurrence et, de l'autre, la municipalité ou l'arrondissement veut empocher le plus de taxes foncières possible.

Le Royalmount aura des impacts majeurs, notamment parce qu'il sera implanté au sein des arrondissements centraux montréalais. Ces arrondissements ont une histoire et, avec le temps, ils se sont dotés d'une variété de lieux d'échanges allant des commerces de proximité, des rues commerciales, telles Sainte-Catherine, Côte-des-Neiges et la Plaza Saint-Hubert, jusqu'à de petits centres commerciaux comme ceux de Rockland et du Marché Central. Il s'agit là d'une offre urbaine équilibrée, profitant en bonne partie des transports en commun et qui présente le grand avantage de répondre de manière variée à divers types d'attentes et de besoins dans le respect des styles de vie des citoyens.

On objectera que le centre-ville et les petits centres commerciaux des arrondissements centraux n'offrent pas d'accès à certaines grandes surfaces commerciales. Ce qui est vrai, mais pourquoi les résidants de Montréal n'iraient pas au Dix30 à Brossard pour faire ce type d'achats, lesquels ne sont quand même pas si fréquents, tout comme des citoyens de Brossard viennent à l'occasion à Montréal pour assister à une partie de hockey au Centre Bell? C'est ça, la réalité vécue à l'échelle d'une métropole.

Une alternative 

Aujourd'hui, à l'ère de l'urbanisme culturaliste qui a remplacé l'urbanisme fonctionnaliste à l'origine des banlieues de l'après-guerre, l'approche vis-à-vis l'aménagement urbain a beaucoup changé. Comme on peut l'observer dans certaines villes sur le continent qui s'avèrent aujourd'hui à l'avant-garde dans ce domaine, comme Vancouver, Portland ou Boston, des autoroutes sont éliminées au profit des transports en commun et des quartiers verts.

Ces quartiers verts deviennent des lieux d'identité, d'usage et d'appropriation par les communautés et prennent le dessus sur les banlieues et leurs centres commerciaux.

Dans son Plan métropolitain d'aménagement et de développement (PMAD), la Communauté métropolitaine de Montréal (dont le président est le maire Denis Coderre) vise heureusement des objectifs semblables. Ainsi, pour favoriser des aménagements durables, ce plan propose de développer des quartiers de type TOD (Transit Oriented Development) en concentrant le développement dans un rayon d'un kilomètre autour des stations, actuelles ou projetées, du métro.

Or, presque l'ensemble du territoire appartenant à la Ville de Mont-Royal à l'angle des autoroutes 15 et 40, où est prévue l'implantation du Royalmount, se trouve dans un rayon d'un kilomètre d'une station de métro. C'est le cas aussi de celui de l'ancien hippodrome Blue Bonnets, appartenant à l'arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce et destiné à être redéveloppé.

Voici une occasion unique qui permettrait à la Ville de Mont-Royal et à Montréal d'éviter les confrontations et les impacts négatifs associés au projet Royalmount et d'oeuvrer ensemble pour le bien public. En développant, avec une approche intégrée, deux quartiers multifonctionnels de bonne densité capables de susciter par leur qualité d'usage et d'environnement l'appropriation des citoyens, chaque quartier mettrait ainsi en valeur son voisin.

Ce type d'aménagement permettrait aux deux villes d'accroître leurs populations, leurs revenus fonciers et la qualité de vie dans ces nouveaux milieux tout en limitant l'usage de l'automobile, les stations de métro se trouvant à distance de marche. C'est beaucoup plus prometteur que de se rabattre sur du Walt Disney réchauffé!