En évoquant vouloir assurer la pérennité du Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP), le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, désire imposer des reculs importants à ses propres employés. Or, rien ne justifie les demandes du Conseil du trésor à la table de négociation. Avec un taux de capitalisation de 98,4 %, le RREGOP est pleinement en mesure de répondre à ses engagements actuels et futurs.

Martin Coiteux indique que le taux de cotisation des salariés n'a jamais été aussi élevé. Soit. Mais a-t-il déjà oublié que lors de la crise financière de 2008, la caisse des participants, gérée par la Caisse de dépôt et placement du Québec, a perdu 25 % de sa valeur ? Que ces pertes aient pu être renflouées en à peine cinq ans grâce, entre autres mesures, à une augmentation raisonnable du taux de cotisation, nous démontre plutôt la maturité et la santé du régime.

La volonté du gouvernement de faire passer de 5 à 8 ans la période de calcul des rentes, d'augmenter la pénalité actuarielle et de reporter l'âge de la retraite sans pénalité à 62 ans provoquerait un appauvrissement indéniable des retraités de l'État, dont les rentes moyennes, se situant à 19 000 $ par année, sont très loin du cliché de la retraite dorée.

Partout dans le monde, des employeurs ont voulu profiter des difficultés traversées par certains régimes de retraite pour diminuer les bénéfices des retraités et ainsi réduire leurs engagements financiers envers leurs salariés.

Cette réalité frappe aussi le Québec, comme nous l'avons vu avec l'adoption du projet de loi 3 portant sur les régimes de retraite municipaux : peu importe la situation particulière propre à chaque régime, les modifications ont été apportées mur à mur, sans distinction. Le gouvernement voudrait aujourd'hui s'attaquer aux bénéfices offerts par le RREGOP, alors que celui-ci répond en tout point, et ce, depuis 1982, aux exigences imposées par le projet de loi 3 : ses coûts sont partagés à 50/50 entre les salariés et l'employeur et sa capitalisation est maintenant pleine et entière.

Nos organisations ont toujours été au rendez-vous pour discuter de la pérennité du régime de retraite des 540 000 employés de l'État. Nous siégeons à de nombreux comités paritaires où l'ensemble de ces questions sont traitées, où différentes améliorations visant la santé du régime sont proposées. Jamais, toutefois, les demandes du Conseil du trésor n'y ont été discutées.

Les mesures proposées sont des attaques à court terme sur les bénéfices offerts aux retraités et n'ont qu'un seul objectif : soutirer 200 millions par année aux retraités de l'État, comme le reconnaît Martin Coiteux.

UN EXODE INQUIÉTANT

À moins que le gouvernement ne vise un autre objectif ? Celui de réduire considérablement le nombre d'employés de l'État en provoquant l'exode de milliers de travailleuses et de travailleurs des réseaux de la santé et des services sociaux, de l'éducation et de la fonction publique ?

Nos bureaux syndicaux, tout comme la CARRA, sont submergés d'appels de salariés inquiets qui désirent précipiter leur départ à la retraite avant l'application éventuelle de ces mesures. Le gouvernement reconnaissait lui-même, récemment, que le nombre de ces départs risque de doubler au cours des deux prochaines années. Alors que nous vivons d'importants problèmes d'attraction et de rétention de la main-d'oeuvre, nous ne pouvons nous permettre une telle perte d'expertise, surtout en pleine période de chambardement de nos réseaux publics.

Il ne faudrait pas que le gouvernement, par entêtement idéologique à rétablir l'équilibre budgétaire et à réduire la taille de l'État, fasse preuve d'irresponsabilité et de politique à courte vue. Nous sommes plutôt guidés par un horizon beaucoup plus large : assurer la pérennité de nos services publics et garantir des revenus décents pour les retraités qui ont consacré leur vie pour le service public.