Comment expliquer une social-démocratie devenue aussi accro à l'État providence? Serait-ce l'avènement d'une société gâtée en proie à la déresponsabilisation, sinon à l'égoïsme? Et qui, après l'abandon de ses valeurs religieuses, aurait laissé tomber ses valeurs humaines?

C'est comme si on avait jeté le bébé avec l'eau du bain. Cédant à une social-démocratie au filet social le plus riche en Amérique, mais affichant le taux de bénévolat et la moyenne de dons les plus bas au pays.

Certains invoqueront un choix de société, d'autres blâmeront les fléaux modernes que sont devenus l'individualisme, la consommation et la perversion de lobbies trop puissants. Une société désormais l'otage d'idéaux et de politiques phagocytes. La sacralisation ultime de l'utilisateur-prédateur? Bien qu'issus d'une société riche dont le dévouement et la générosité ont longtemps façonné ses valeurs individuelle et collective; celles-ci semblent aujourd'hui diminuées, sinon consumées par l'intérêt personnel devenu credo populaire.

Alors que pour l'éthique protestante, s'enrichir individuellement permettrait de mieux redonner temps et argent à la communauté, cette adéquation éluderait le Québec. Nous sommes loin du fort esprit de vocation jadis propre à nos groupes religieux, à l'enseignement et à la médecine, où l'État supportait peu les crèches, les orphelinats, les garderies, les hôpitaux, les hospices et les services sociaux.

Les attentes modernes et irréalistes des contribuables québécois auraient-elles un lien avec ce désir de voir l'État prendre le relais à tout prix, sans avoir à s'impliquer individuellement? Dans les sociétés où on trouve un meilleur équilibre entre droits et devoirs, et une présence plus prononcée du bénévolat, la dépendance étatique serait moins aigüe et coûteuse. Bien que l'enrichissement personnel soit bien ancré et devenu la norme au Québec, s'enrichir collectivement pourrait-il devenir un idéal et un moteur de rédemption sociale et nationale?