Doit-on permettre d'ouvrir des mosquées au Québec ? Le cas de Shawinigan est intéressant.

Le conseil municipal ne dit pas aux musulmans qu'ils ne peuvent pas ouvrir une mosquée. Il leur dit simplement qu'ils ne peuvent pas le faire dans le parc industriel, règlement de zonage oblige.

Cela est tout à fait légitime pour un conseil municipal et, selon le maire Michel Angers, il y aurait une soixantaine d'autres endroits à Shawinigan où les musulmans pourraient installer leur mosquée. Les musulmans pourront donc vraisemblablement avoir leur mosquée, quelque part en ville, s'ils le désirent. L'histoire devrait s'arrêter là.

Cependant, à cause de la guerre que mène le groupe État islamique au monde entier, nous avons les nerfs à vif, moi le premier. Le monde a peur. Les récents attentats à Copenhague, Paris, Ottawa ou Saint-Jean-sur-Richelieu mettent le monde à l'envers. C'est le chaos. On dirait qu'on n'est plus capable de réfléchir par nous-mêmes.

Aussitôt que ça devient un peu complexe, on crie au loup. Les mots charia, sunnites, chiites, islam, musulman, arabe, mosquée, nous hérissent le poil. On se rabat sur le gouvernement pour nous dire comment penser, pour nous dire quoi faire. On se comporte comme des enfants d'école. On cherche notre mère. Aurions-nous encore peur du Bonhomme Sept Heures ?

Notre rempart, c'est la Charte québécoise des droits et libertés, en vigueur au Québec depuis 1974, bien avant la Charte canadienne qui, elle, a été promulguée en 1982 sous l'égide du ministre de la Justice de l'époque - Jean Chrétien, le « p'tit gars de Shawinigan » comme il aime se faire appeler. Ironie du sort, Jean Chrétien demeure encore à Saint-Jean-des-Piles, un des sept secteurs fusionnés de la ville de Shawinigan. On ne se demande pas ce que Jean Chrétien aurait le goût de souffler dans l'oreille de son maire si l'occasion se présentait...

Ici, la Charte est garante de notre façon de vivre ensemble. Voilà ce qui devrait toujours guider notre façon de penser. Les musulmans ont droit à leurs mosquées au Québec comme les juifs ont droit à leurs synagogues, les chrétiens à leurs églises, les bouddhistes à leurs temples, les mormons et les Témoins de Jehovah à leurs lieux de culte.

Embâcle à la folie

Non seulement on devrait permettre aux musulmans d'ouvrir des mosquées au nom de la liberté d'expression, mais on devrait les inviter, comme les chrétiens, les juifs et les autres, à y faire embâcle à la folie de la radicalisation religieuse et à y faire la promotion de la tolérance et de la compassion.

La propagande du groupe État islamique est avant tout relayée par les médias sociaux. À mon avis, on devrait avoir beaucoup plus peur de ce que nos enfants font dans l'internet plutôt qu'à la messe le dimanche ou à la prière du vendredi à la mosquée ou à la synagogue.

Si l'on veut gagner la guerre contre le groupe État islamique, ce n'est sûrement pas à la mosquée de Shawinigan que ça va se passer. Ce n'est même pas en bombardant du haut des airs. Il faut voir plutôt sur le terrain : en Syrie, en Irak, au Nigeria ; arrêter les djihadistes, manu militari, un par bras, comme on arrête les criminels habituellement, sinon fatalement.