Les médias font état, ces jours-ci, de la tendance de plus en plus marquée à l'accaparement des terres agricoles du Québec par des sociétés d'investisseurs. Ces trusts financiers ont flairé la bonne affaire, étant donné les difficultés qu'éprouvent les milieux agricoles. Les uns sont confrontés à l'absence de relève. D'autres font face à l'endettement lié au choix de s'inscrire dans la dynamique d'industrialisation de l'agriculture.

Dans les faits, cette multiplication des achats et de l'exploitation de terres agricoles par de grands propriétaires conduira vraisemblablement à un retour au métayage.

Sans entrer dans toutes les spécificités de ce mode d'exploitation des terres agricoles, rappelons simplement qu'il y a quelques siècles, de grands propriétaires fonciers se liaient à des paysans avec lesquels ils convenaient d'une répartition du produit des cultures. En somme, ils acceptaient qu'une partie du travail agricole dont ils tiraient les bénéfices revienne aux producteurs. Ces paysans n'en étaient pas moins des «obligés», des travailleurs agricoles, en quelque sorte.

L'affranchissement progressif par la paysannerie du contrôle des terres a favorisé un mode de production centré sur l'exploitation familiale. Mais, depuis quelques décennies, l'industrialisation a pénétré tous les domaines de la production, y compris celui de la production agricole. Ce qui a donné lieu à la situation que nous connaissons aujourd'hui : la cohabitation d'une exploitation agricole sur le modèle familial traditionnel avec d'autres, davantage axées sur une production intensive à grande échelle.

Avec l'acquisition de très grandes surfaces cultivables au Québec par des firmes d'investisseurs, nous retrouvons en quelque sorte le système de métayage des siècles passés : les paysans redeviennent des travailleurs agricoles auxquels les grands propriétaires consentent l'utilisation d'une parcelle des terres pour la subsistance familiale. Difficile d'imaginer qu'une telle démarche signifie un quelconque progrès.